mercredi 29 avril 2020

Premières armes (20)


« Ta mère m’a appelée.
Ça a été la première chose. Tout de suite. Avant même de me tendre les lèvres pour me dire bonjour.
‒ Oui, elle m’a appelée. Viens là !
Près d’elle, sur le lit. Où je me suis étendu, sur le ventre, avec mille précautions.
Elle a ri.
‒ Oui, hein ! Je sais. Tu viens encore de t’en prendre une. Et carabinée.
Elle a redressé son oreiller. L’a tapoté.
‒ En douce que j’en ai appris de belles sur ton compte
J’ai intérieurement soupiré.
Qu’est-ce que Margaux avait bien pu aller lui raconter ?
‒ Ah, tu caches bien ton jeu, ça, on peut pas dire !
‒ Quel jeu ?
‒ Fais bien l’innocent !
Elle s’est tournée vers moi. S’est appuyée sur un coude.
‒ Montre-moi ! Allez !
J’ai dégrafé mon pantalon. Me suis soulevé pour le faire glisser. Avec le boxer.
‒ Plus bas !
Jusqu’en haut des cuisses.
‒ Ah, oui, dis donc ! Oui.
Elle m’a posé la main sur une fesse. A enfoncé un doigt. Un autre.
‒ Ça te fait mal ?
‒ Un peu.
Elle a éclaté de rire.
‒ Un peu ? Tu dois déguster, oui. Vu l’état dans lequel t’as le derrière. Mais je vais sûrement pas te plaindre. Vu la façon dont tu t’es comporté
L’autre fesse. Sur laquelle elle a fait courir son ongle.
‒ Elle est encore plus rouge, celle-là ! Et quand je dis rouge, c’est carrément écarlate, oui !
Elle y a creusé un sillon. Du bout de l’ongle.
J’ai serré les dents pour ne pas crier.
‒ Et quand je pense que t’as eu le culot de lui soutenir que c’était injuste. Que tu l’avais pas méritée, cette fessée ! Elle est gentille, ta mère, moi j’trouve ! Elle est gentille. Parce qu’il y en a beaucoup d’autres, elles t’en auraient collé une deuxième par-dessus pour t’apprendre à nier l’évidence. Et à tenir tête.

Elle a gardé un long moment le silence. Et puis
‒ Tu n’as rien à me dire ?
À lui dire ? Non. Quoi ? Je voyais pas.
‒ Vraiment pas ?
‒ Non. Non. Je t’assure.
‒ Parce qu’on a parlé, ta mère et moi, figure-toi ! Alors il y a ce que tu as fait. Et la façon dont tu t’es comporté. Dont tu te comportes. Qui l’oblige à sévir. Chaque fois que nécessaire. Mais il n’y a pas que çaCamille, ça te dit rien ?
‒ Camille ? Non. Je vois pas.
‒ T’en as pas marre de te foutre de moi ?
‒ Mais je me fous pas de toi. C’est quoi, toute cette histoire ?
‒ C’est que c’est une fille avec qui tu couches, Camille. Voilà ce que c’est.
‒ Mais jamais de la vie enfin ! C’est juste la fille d’une femme que connaît ma mère.
‒ Et devant qui elle t’a donné une fessée, oui, je sais. Et une fessée amplement méritée. Mais il y a pas eu que ça. Il y a eu qu’après tu l’as revue, cette Camille. Que tu la revois. Que t’arrêtes pas de la revoir. Et que tu couches avec.
‒ Je te jure que
‒ Tu mens ! Tu mens !
‒ Mais non, je mens pas, non ! Comment faut te le dire ?
‒ Dis tout de suite que c’est ta mère qui ment alors
‒ C’est pas qu’elle mente, mais vous vous êtes mal comprises, sûrement. C’est obligé. Ça peut pas être autrement…
‒ Ben, voyons ! Bon, alors tu sais pas ? On va s’en tenir là tous les deux. Et tant que tu seras pas décidé à me dire la vérité, inutile de revenir. Ou de m’appeler. Parce qu’à la limite que tu la sautes, j’en ai rien à battre. Tu me dois rien. On s’est rien promis. Seulement si tu me mens là, tu me mentiras d’autres fois. Tu me mentiras pour plein de choses. Tout le temps. Je saurai jamais sur quel pied danser avec toi. Jamais. Et ça, je le supporterai pas.
‒ Mais je te mens pas.
‒ Fous le camp, va ! Fous le camp. Ça vaudra mieux.

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