mercredi 31 janvier 2018

Pauline, Jessica, Chloé et les hommes mariés (3)

Dessin de Mike:

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– On s’en trouve un autre ?
– Oh, oui, oui. Je me suis trop régalée, moi ! Comment il était mal à l’aise, le type !
– Faut dire qu’il y avait de quoi !
– Tu vas quand même pas le plaindre !
– Ah, ça, non ! Il y a pas de risque. Parce que, pour dire qu’il se fout allègrement de sa bonne femme, sans compter les autres nanas, à qui il fait miroiter monts et merveilles pour arriver à ses fins, une fessée, c’est vraiment pas cher payé.
– Bon, ben on remet ça alors ? À qui le tour ? Chloé ?

À mon tour. J’ai passé la soirée et une bonne partie de la nuit à éplucher une multitude de profils pour finalement arrêter mon choix, après bien des hésitations, sur un type qui se la jouait à l’original forcené. Ce qui m’a déterminée, c’est l’envie de voir ce qu’il y avait vraiment derrière. Une véritable personnalité ou un individu falot cherchant à donner l’illusion de ce qu’en réalité il n’était pas.
Les filles se sont montrées dubitatives.
– T’es sûre de ton coup, là ?
– Ça coûte rien d’essayer.
– J’ai bien peur qu’on perde notre temps.

Au vu de nos premiers échanges, par mail comme par téléphone, j’étais pas loin de leur donner raison. Il éludait toutes mes questions, s’en tirait, chaque fois, par une pirouette ou une plaisanterie. Bref, il me filait entre les doigts. Tant et si bien que c’est moi qui ai fini par lui proposer une entrevue. Pour en avoir le cœur net.
Il était beau gosse. Souriant. Séducteur dans l’âme. Et jeune. Très jeune. Pas plus de vingt-quatre ou vingt-cinq ans.
Pauline et Jessica, qui l’avaient observé, de dehors, n’en revenaient pas.
– Tu te demandes ce qu’un type comme ça fout sur un site de rencontres.
– Il est pas marié, si ça se trouve.
– Ben ouais, parce qu’au début, ils la trompent pas, leur femme. C’est après que ça les prend.
– Tu vas voir que ce mec, avec un peu de chance, tu vas faire ta vie avec. Ce serait quand même fou, ça, non ?
– De quoi vous avez parlé ?
– De rien en fait. Strictement rien. Dès que ça devient un peu sérieux, il prend des chemins de traverse. Et il plaisante. Il arrête pas de plaisanter. À mon avis, c’est le genre de mec qu’est convaincu que, pour mettre une femme dans son lit, il faut la faire rire.
– C’est quoi, son boulot ?
– Si je vous dis que j’ai pas réussi à le lui faire cracher, vous allez me croire ?
– C’est comme pour savoir où il habite. Ça va pas être simple. Il a pris le métro. Et là, on l’a perdu de vue quasiment tout de suite.

À la deuxième rencontre, je l’ai laissé causer, causer et encore causer et puis, d’un coup, j’ai attaqué bille en tête.
– Qu’est-ce tu veux en fait ?
Il s’est troublé.
– Comment ça ?
– Ben, je sais pas. Tu parles pour ne rien dire. Tu brasses du vent. Tu cherches pas à ce qu’on fasse vraiment connaissance. Alors moi, ce que je me demande, c’est ce que tu peux bien fabriquer sur un site de rencontres. Je te plais pas ? Tu me trouves trop âgée par rapport à toi. Dis-le carrément. J’en ferai pas une maladie.
– Mais non, c’est pas ça.
– C’est quoi alors ?
– Non, rien. Je suis con. Laisse tomber ! Vaut mieux qu’on s’en tienne là.
– T’es marié, hein, en fait !
Il m’a lancé un regard stupéfait.
– Comment tu le sais ?
– T’es marié. Et t’as à la fois envie et pas envie d’aller voir ailleurs. Alors tu te jettes à l’eau, mais, en même temps, tu freines des quatre fers. Tu te débrouilles pour que ça marche pas. Pour que la nana, elle t’envoie sur les roses. Parce que tu culpabilises. C’est pas vrai ce que je dis là ?
– J’aime ma femme.
– Ce qui, pour le moment, te retient de la faire cocue, mais dans un an, dans deux ans, quand la passion se sera affadie, quand la routine se sera installée, tu la tromperas allègrement.
– Je sais pas. Je…
– Bien sûr que si ! Et tu foutras ton couple en l’air. Parce qu’un jour ou l’autre, elle l’apprendra. Et elle le supportera pas. Alors peut-être que la solution, ce serait d’allumer tout de suite des contre-feux. Que je la mettre au courant. Tu n’es pas encore passé à l’acte. Elle se montrera indulgente…
– On voit que tu la connais pas.
– Par contre, elle te placera sous haute surveillance, oui, ça, sûrement.
– Tu peux pas la prévenir n’importe comment. Tu la connais pas.
– J’ai ton nom. Et je sais où t’habites. Tu jacasses tellement dans tous les sens que tu ne t’es seulement pas rendu compte que tu te trahissais tout seul. Comme un grand.
– Je suis mort, quoi !
– Quand on joue avec le feu… Oh, mais fais pas cette-là ! Je suis pas un monstre. Je vais rien lui dire à ta dulcinée.
Son visage s’est éclairé.
– Oh, merci ! Merci !
– Non. Je vais te proposer, à la place, une peine de substitution.
Et aussitôt rembruni.
– Comment ça ?
– Ben oui, reconnais avec moi qu’on ne peut pas, dans ton intérêt, ne pas marquer le coup. Il y a eu faute. Il faut qu’il y ait sanction. Sans compter que, comme ça, tu sauras, à l’avenir, que le moindre petit coup de canif dans le contrat peut te retomber à tout moment sur le coin de la figure. Sans crier gare.
– Ça va être quoi ?
– Une fessée…
– Une fessée, mais…
– Tu as quel âge ?
– Vingt-deux.
– Oui, ben t’es encore en âge d’en recevoir. En plus, ça te fera un bien fou, tu verras. Tu te sentiras beaucoup mieux après. Parce que t’auras payé ta dette.
Je me suis levée.
– Je t’attendrai samedi. À quatre heures. À cette adresse.
Il a pris la carte. S’est levé à son tour.
– Et tâche de pas oublier. Sinon, une heure après, ta femme est au courant.

À quatre heures tapantes, il était là.
– Ah, ben c’est bien, toi, au moins, t’es ponctuel. Bon alors, maintenant tu te déshabilles. Tout, t’enlèves. Et tu me rejoins à côté.
Quand il est entré, qu’il s’est trouvé nez à nez avec Pauline et Jessica, il a, d’instinct, ramené ses mains en coquille sur son bas-ventre.
Elles ont éclaté de rire.
J’ai haussé les épaules.
– Allons ! Allons ! Qu’est-ce que c’est que ces pudeurs de jeune fille ! Viens ici plutôt ! Là… En travers de mes genoux. Sur lesquels il s’est docilement incliné. Je l’y ai bien calé.
– Prêt ?
Il a vaguement bredouillé quelque chose.
– Alors, feu !
Et je m’en suis donné à cœur-joie. Une bonne vieille fessée à la main. Lancée de haut. Lancée de loin. À plein régime. Ça claquait. Ça résonnait. Elles rougissaient à vue d’œil, ses fesses. Et elles vivaient. Elles se contractaient, elles s’ouvraient, elles se resserraient en cadence. Il a commencé doucement à se plaindre. De plus en plus fort. De plus en plus profond. Et puis il a crié. Sans la moindre retenue. Sans la moindre pudeur.
Je l’ai laissé se relever.
– C’est bon. Tu peux aller te rhabiller. Et rentrer retrouver ta femme.
Il a trottiné jusqu’à la porte en se tenant les fesses.

On l’a suivi des yeux, par la fenêtre, jusqu’à ce qu’il ait disparu derrière la pharmacie.
– Ça marche, n’empêche ! Ça marche à chaque fois.
– Et ça marchera encore. Un mec marié, il est prêt à tout – absolument tout – pour pas que sa femme sache qu’il le trompe.
– En attendant, c’est quand même plus agréable quand ils sont jeunes, comme celui-là, avec des petites fesses bien fermes.
– Oui, et puis je sais pas vous, mais moi, quand le mec il est pudique, comme c’était le cas là, je trouve que c’est beaucoup plus agréable à regarder.
– Parce que tu vois aussi sa gêne.
– Il y a un truc que je voudrais te demander, Chloé, toi qui l’avais sur les genoux. Il bandait ?
– Pas du tout, non. Au contraire. C’était tout recroquevillé. Tout rabougri.

mercredi 24 janvier 2018

Pauline, Jessica, Chloé et les hommes mariés (2)

Dessin de Mike:

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Une petite semaine de SMS, de coups de téléphone.
– Il m’en raconte, mais il m’en raconte ! À l’entendre, il dirige cinq ou six entreprises à lui tout seul. Il a des succursales en Chine, au Brésil et tutti quanti.
– Il te prend pour une conne, quoi !
– On peut dire ça comme ça.
– Et, bien entendu, il est libre.
– Comme l’air.
– Et n’a jamais eu de chance avec les femmes, je parie !
– T’as tout compris.
Une petite semaine et le type – Adrien, il s’appelait – a voulu une rencontre. Que Pauline lui a bien volontiers accordée. À condition que ce soit dans un lieu public. Un café.
Jessica et moi, on s’est installées aux premières loges, à la terrasse de celui d’en face. Des types entraient, sortaient. A fini par en surgir un d’allure parfaitement insignifiante.
– C’est lui ! C’est celui-là. Je suis sûre que c’est lui.
– Eh ben dis donc ! Faudrait vraiment avoir rien d’autre à se mettre sous la dent.
Ils sont restés plus d’une heure à l’intérieur à discuter.
– Bon, alors, qu’est-ce qu’ils foutent ?
Se sont enfin décidés à sortir. Séparés sur le trottoir.
On l’a discrètement pris en filature. De loin.
– Quand je pense qu’on va lui tanner le cul ! J’arrive pas à y croire.
– Attends ! Attends ! C’est pas encore fait.
Jusqu’à sa voiture qu’il avait garée dans une petite rue latérale. Une Twingo grise.
– Bon, ben voilà ! On connaît sa voiture maintenant.
Il a démarré en trombe.
– Et on a le numéro.

– Qu’est-ce que vous avez bien pu vous raconter pendant tout ce temps-là ?
– Devinez, les filles !
– Il a parlé de lui.
– Voilà. De lui. De lui. Et encore de lui.
– Comme la plupart des mecs. C’est le seul sujet de conversation qu’ils trouvent intéressant.
– Oh, ben dis donc, la purge !

Ils se sont revus quelques jours plus tard.
– C’est pas que ça m’enthousiasme, mais bon… Si on veut arriver à nos fins.
Jessica et moi, on est parties, pendant ce temps-là, à la recherche de sa voiture. Qu’on a trouvée sans difficulté. À quelques encablures de laquelle on a garé la nôtre. Et on a attendu. Une bonne demi-heure. Au bout de laquelle il a fait sa réapparition en sifflotant.
– Allez, go ! On le suit.
Un bon morceau d’autoroute. Un petit bout de Nationale.
– Faudrait pas qu’il s’aperçoive qu’on le piste…
– Penses-tu ! Il est sur un petit nuage, là. Il pense à Pauline. Il y a rien d’autre qui compte. Il voit rien. Il entend rien. Pauline… Pauline… Pauline… Qu’il est convaincu de sauter incessamment sous peu. Il s’en pourlèche les babines tout en conduisant.
Une zone pavillonnaire. L’une des toutes premières maisons. Dont il a actionné le portail électrique.
On a poursuivi notre route.
– Bon, ben voilà, mission accomplie. Suffira de revenir relever discrètement, demain ou après-demain, le nom sur la boîte aux lettres. Et d’aller ensuite faire un tour sur les pages blanches. Et, dans la foulée, sur Internet.

– Bon, ben il y a plus qu’à alors… Maintenant qu’on a tous les renseignements qu’il nous faut.
– Déjà !
– Franchement, c’est pas le genre de mec avec qui t’as envie de faire traîner les choses en longueur. Je me fais chier avec, mais je me fais chier ! Alors on lui flanque sa petite correction et on passe à autre chose. Ou à un autre. Allez, je l’appelle et on en finit.

Dans le hall de l’hôtel, quand il a aperçu Pauline, son visage s’est éclairé d’un large sourire. Il lui a pris le bras. Jessica et moi, on s’est approchées.
– Bonjour, Luc.
– Bonjour…
D’un air complètement hébété.
– Vous nous reconnaissez pas ? On est des amies de Séverine, votre femme.
– Je n’ai pas…
Et il a voulu entraîner Pauline. Qui ne l’a pas entendu de cette oreille.
– Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Tu es marié ?
– Mais pas du tout. Viens ! Je les connais pas. Ce sont deux folles.
Deux folles qui les ont suivis jusqu’à la porte de la chambre. Auxquelles il a voulu fermer la porte au nez. Que Pauline l’a obligé à laisser entrer.
– Ah, mais si ! Si ! Je veux en avoir le cœur net. Il est marié ?
– Bien sûr qu’il est marié. Avec Séverine, une coiffeuse. Tenez ! Voilà son numéro. Appelez-la si vous voulez.
Elle a fait mine de commencer à composer le numéro.
– Attends ! Attends ! Je vais t’expliquer.
– M’expliquer quoi ? Que t’es un gros salopard ?
– Non ! Non ! C’est parce que…
– Et il y en a beaucoup, comme ça, que tu roules dans la farine ?
– C’est la première fois, je te jure.
– Ben, bien sûr ! Non, mais c’est bon, là, faut la mettre au courant, ta bonne femme.
– Fais pas ça, je t’en supplie ! Tu te rends pas compte des conséquences.
– Ah, oui ? Je fais quoi alors ? Je te flanque une fessée pour te faire passer l’envie de recommencer ? Oui, tiens, c’est une idée, ça ! Allez, baisse ton bénard !
– Hein ? Tu peux pas me demander ça !
– Si, je te le demande ! Si ! Allez ! Le cul à l’air ! Non ? Bon…
Et elle a composé le numéro.
– Ça sonne.
– Raccroche ! Raccroche !
– À poil, alors !
Il a paru hésiter.
– Allô…
Oh, comment il s’est dépêché de le quitter le falzar !
– Raccroche ! Raccroche !
Pauline a posé le téléphone, tiré un tabouret, s’est assise.
– Viens là ! Plus près ! Ton slip !
Il a hésité et puis il l’a baissé. Jusque sur les mollets. Elle l’a saisi par le bras, fait basculer en travers de ses genoux.
Il a fait une dernière tentative.
– S’il te plaît, tu vas pas…
Elle a lancé une première claque. Pas très fort. Une autre. Une dizaine. Et puis ça s’est brusquement emballé. De plus en plus fort. De plus en plus vite.
Jessica a chuchoté.
– Elle y prend goût, on dirait.
Elle y prenait goût, oui, c’était clair.
– Elle s’arrêtera pas !
– En attendant, comment ça le lui met rouge.
Lui, il commençait à gigoter, à se soulever du derrière et à piauler. Des espèces de borborygmes plaintifs d’arrière-gorge.
Elle s’est interrompue d’un coup.
– Dégage !
Il s’est reculotté. En nous tournant le dos. Et il a filé sans demander son reste.
Il avait à peine refermé la porte qu’on est parties, toutes les trois, d’un gigantesque fou rire.
– Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître.
– Sa tête, non, mais sa tête !
– En tout cas, il est pas près d’y remettre le nez.
– Oui, oh, alors ça !

mercredi 17 janvier 2018

Pauline, Jessica, Chloé et les hommes mariés (1)

Dessin de Mike:

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Jessica s’est laissée tomber sur le canapé en poussant un soupir à fendre l’âme.
– Faut quand même que je sois un peu conne, avouez, les filles ! Parce que le type qu’arrive jamais à se libérer un week-end, qui veut pas que tu l’appelles après sept heures du soir, il y a quand même toutes les chances qu’il y ait anguille sous roche.
– C’est pas faute de te l’avoir répété. Tant et plus. Sur tous les tons.
– Je sais bien, oui, mais quand on a envie d’y croire…
– Bon, mais il t’a dit quoi, alors, finalement ?
– Ben ça ! À force que je le pousse dans ses retranchements. Qu’il était marié, mais que ça allait pas durer. Parce qu’il est en instance de divorce. C’est l’affaire de quelques semaines de patience.
– Oui, oh, alors là ! Tu veux qu’on te dise ce qui va se passer ? Parce qu’on connaît le truc toutes les deux. On a déjà donné. Dans trois ou quatre mois, à force que tu le tarabustes, il va finir par t’avouer que la procédure de divorce n’est pas encore vraiment engagée, mais que ça se fera. Sûr. Mais pas tout de suite. Plus tard. Quand sa femme sera sortie de sa dépression nerveuse. Quand les enfants seront grands. Quand la maison sera finie de payer. Au choix. Quand les poules auront des dents, quoi, en fait ! Parce que, en réalité, ils ont jamais vraiment envie de la quitter leur bonne femme, ces types. Ils jouent à se le faire croire. Et à te le faire croire. T’auras beau dire et t’auras beau faire, tu resteras toujours la maîtresse, celle à qui on dispense quelques miettes, quand on en est, et un peu d’espoir quand elle commence à perdre patience.
– C’est dégueulasse !
– Ça, on te le fait pas dire. Mais c’est comme ça. Quatre-vingt-quinze pour cent des inscrits, sur les sites de rencontre, ils sont déjà mariés.
– Les salauds ! Bon, mais qu’est-ce que je fais, moi, alors, pour Sylvain ?
– On n’a pas de conseils à te donner, mais nous, à ta place, on se sauverait en courant. Tu perds ton temps.
– Et après ? Je fais quoi, moi, après ? Je me trouve un mec où, s’ils sont tous vérolés, ces sites  ?
– Bonne question.
– C’est ignoble de jouer comme ça avec les sentiments des gens. Je sais pas ce que je leur ferais, tiens, moi, si je pouvais…
Pauline a proposé.
– Et si on leur donnait une petite leçon ?
– Comment ça ?
– Ben, un mec marié qui court, sa grande terreur, c’est que sa femme découvre le pot-aux-roses. Alors, imaginez ! On en flaire un sur Internet. Il y en a une de nous trois qui le contacte. Qui le fait un peu mariner. Qui le rencontre. Les deux autres, elles, elles le pistent discrètement quand il repart. Elles repèrent où il habite. Elles s’assurent, d’un petit coup d’œil à la boîte aux lettres, qu’il est bien marié. S’ensuivent d’autres rencontres. Il s’enflamme, le type. Il envoie des tas de messages. De plus en plus compromettants. Il se fait pressant. Un rendez-vous ! À l’hôtel. Un rendez-vous ! Il n’a plus que ça en tête. Le grand jour finit enfin par arriver. Il se précipite, la bave aux lèvres et la queue en batterie. Et il nous trouve toutes les trois dans la chambre. Il est un peu interloqué, mais il essaie de rien laisser paraître. Des fois, on sait jamais, qu’il en ait trois pour le prix d’une. « Alors comme ça, on est marié ? » « Hein ? Ah, mais pas du tout ! Pas du tout ! » « Menteur ! Tu sais que c’est pas beau du tout de tromper sa femme ? Que tu mériterais d’être puni pour ça ? Et que d’ailleurs tu vas l’être. »
Il panique. Il déglutit. Il jette tout un tas de regards inquiets et implorants autour de lui.
« Eh, oui ! Tu vas gentiment te déculotter. Histoire qu’on te donne une bonne fessée qui te fera passer l’envie d’aller chercher ailleurs ce que t’as à la maison. Sinon… Sinon, demain matin, à la première heure, ta femme sera au courant de tes agissements. Preuves à l’appui. »
Il essaie de gagner du temps, de discuter, d’apitoyer, mais, on se montre intraitables. Déterminées. Et, au final, il a pas le choix. Bien obligé de se résoudre, la mort dans l’âme, à nous offrir son petit derrière pour une bonne claquée.
Jessica a applaudi des deux mains.
– Génial ! C’est vrai, ça ! Il y a pas de raison que ce soit toujours eux qui mènent la danse. Un peu à notre tour. On commence quand ?
– Oh, mais quand on veut. Tout de suite si on veut.
– Eh bien, allez alors !
Et on s’est rassemblées, toutes les trois, autour de mon ordinateur. On a fait défiler les profils.
– Première règle, les filles, on en choisit un qu’a pas mis de photo. S’il l’a pas fait, c’est peut-être qu’il est laid à faire peur, mais c’est, plus vraisemblablement, parce qu’il redoute qu’une bonne copine de sa femme, passant par là, le reconnaisse et vende la mèche. On est donc sur la bonne voie.
On a longuement hésité. Et finalement arrêté notre choix sur un type qui se disait chef d’entreprise. Sans plus de précisions.
– Oui, mais alors ça, moi, je demande à voir. Parce que vous avez remarqué ? Ils sont tous ou professeurs ou commerçants ou cadres de quelque chose.
La trentaine.
– Pareil. Rajoutez une bonne dizaine d’années.
Et bourré de qualités. Intelligent. Cultivé. Sportif. Tolérant. Sentimental. Plein d’humour.
– Il va pas dire le contraire.
Bon, mais alors, qui c’est qui s’y collait la première ?
– Pauline ! Pauline ! C’est elle qu’a eu l’idée.
Et Pauline a envoyé un premier message.