mercredi 8 avril 2020

Premières armes (17)


On est allés chez elle.
« Que tu saches où j’habite au moins
Où on a aussitôt roulé sur le lit. Elle y a eu son plaisir. J’y ai eu le mien.
Et, de fil en aiguille, on a passé la journée ensemble.
À midi, on a déjeuné d’une omelette aux fines herbes et d’une tranche de jambon. Les fesses posées au bord de la chaise, j’ai grimacé tant et plus. Sous ses regards compatissants.
‒ Oh, là là, mon pauvre ! T’as très mal ?
Je me suis efforcé de faire bonne figure.
‒ Pas trop ! Ça va.
Mais, en réalité, ça me battait d’une force là-dedans !
‒ Bon, ben viens alors !
Sous la couette. Nous ébattre allègrement.

‒ Sept heures ! Déjà !
C’était pas tout ça, mais fallait que je rentre, moi !
‒ Tu peux bien rester
‒ Non. Non. Je vais y aller.
‒ Ben, pourquoi ? T’es pas bien, là, avec moi ?
‒ Mais si, mais
‒ Mais quoi ? Maman va encore punir son grand garçon s’il rentre pas à l’heure à la maison, c’est ça ?
‒ Quand même pas, non !
‒ Eh ben alors !
Et je suis resté.

Elle a chuchoté.
‒ Tu dors ?
Je n’ai pas répondu.
‒ Hein ? Tu dors ? Oui, tu dors ! Je t’ai mis sur les rotules, faut dire ! Mais c’est ta faute aussi ! Parce que comment c’est excitant un cul de mec qui vient d’être puni comme ça ! C’est la première fois que j’en vois un en plus ! Mes frères ? Oui, je sais, je t’ai menti. Pour les besoins de la cause. Ils en ont jamais eu, mes frères. T’es le premier qui me tombe sous la main. Depuis le temps que je rêvais de m’en trouver un ! C’est pour ça : je peux te dire que je vais pas te lâcher. Ah, non, alors ! Je vais en profiter un maximum. Et j’espère bien que c’est souvent qu’elle t’en donne ta mère, des fessées. Ce que je crois, d’ailleurs ! Et j’imagine…
Elle s’est tue. Elle a écouté.
‒ Non, tu dors. Tu dors comme un bébé. Et t’es pas près de te réveiller. Oui, j’imagine… J’imagine ta mère. « Viens ici, Alexandre ! » Toi, tu sais ce qui t’attend. Tu sais que tu y échapperas pas. Mais t’essaies quand même de gagner du temps. Ne serait-ce qu’une minute. Ou que quelques secondes. Tu tentes de discuter. De l’apitoyer. Tu supplies. « Pas à mon âge, maman ! C’est trop humiliant. » « Tu n’avais qu’à y penser avant ! » Et il n’y a rien à faire. Elle ne veut rien entendre. « Déculotte-toi, Alexandre ! » Tu obéis. Tu finis par obéir. Tu te déshabilles. Docilement. Inutile d’aggraver ton cas. Tu obéis, grand garçon tout nu qui s’approche, tout penaud, tête basse, de sa maman pour recevoir la fessée qu’il a méritée. « Plus près ! Encore ! Allez ! » Elle te fait basculer en travers de ses genoux. Et elle tape. Non, mais comment elle tape ! Ça te rebondit sur le derrière. Ça s’y inscrit tout rouge. Tout reluisant. Et toi, à force, tu te mets à gigoter. À battre des jambes dans tous les sens. T’es trop rigolo, comme ça, avoue ! J’en mouille, moi, tiens ! Et pas qu’un peu ! Et puis alors à t’entendre piauler, en plus ! Ah, t’y vas de bon cœur ! Et tu sais ce que je me demande ? C’est si t’as une sœur, toi. On n’en a pas parlé. Ou même plusieurs. Et si elle te le fait devant elles. Oui, sûrement ! Elles doivent se régaler, dis donc !
Elle s’est encore interrompue, encore penchée sur moi.
‒ Dors ! Dors ! Surtout te réveille pas ! Et tu sais ce que je me demande aussi ? C’est pourquoi elle te la donne, la fessée, ta mère ! Parce qu’il peut y en avoir plein des raisons. Par exemple, que tu te montres insolent. Que tu lui réponds. Et ça, c’est le genre de choses qu’il est pas question qu’elle laisse passer. Elle a pas tort, d’ailleurs. À moins que tu trempes dans des trucs un peu louches, style trafic de drogue. Ou des trucs comme ça. Ce qui m’étonnerait d’ailleurs : t’as pas l’étoffe. Mais enfin, on sait jamais. Il y en a qui cachent bien leur jeu. Non, moi ce que je verrais plutôt, c’est que tu te comportes encore comme un gamin capricieux. Tu piques des grosses colères pour rien. Tu trépignes. Tu hurles. Et le seul moyen de te calmer, c’est ça. La fessée. Comme quand t’avais huit ans. Et puis, c’est peut-être complètement autre chose. À quoi je pense pas du tout. N’empêche, comment c’est agaçant de pas savoir ! Oh, mais je saurai. Je finirai bien par te le faire dire. Et si j’y arrive pas, je verrai avec ta mère. N’importe comment, faut que je fasse sa connaissance, à cette femme. Ça s’impose.

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