C’est
mon portable qui m’a tiré du sommeil. Insistant. Je l’ai cherché
à tâtons, dans l’obscurité.
Julie.
C’était Julie.
« Allô…
Oui ?
‒ Je
te réveille pas ?
‒ Oh,
non ! Non !
Il
était sept heures du matin.
‒ Je
t’appelle parce que… Tu m’en veux pas ?
‒ T’en
vouloir ? Non. Pourquoi je t’en voudrais ?
‒ À
cause d’hier. De ce que je t’ai dit. Mais c’est sorti tout
seul. J’aurais pas dû, je sais. Parce que c’est le genre de
choses, qu’il reçoive la fessée, un type, il aime pas qu’on
soit au courant. Ou qu’on s’en aperçoive. Surtout à ton âge.
Et surtout si c’est une fille. C’est drôlement humiliant. Je
devrais être vaccinée pourtant, depuis le temps, avec mes frères.
Mais je parle sans réfléchir des fois. Presque toujours en fait.
Quitte à m’en mordre les doigts après. Bon, mais alors c’est
vrai ? Tu m’en veux pas ?
‒ Pas
le moins du monde, non.
‒ Comment
je me sens soulagée, tu peux pas savoir…
Il
y a eu un long silence.
‒ Allô…
T’es toujours là ?
J’étais
toujours là, oui.
‒ Tu
vas faire quoi, là, maintenant ?
‒ Déjeuner.
Et puis bosser mes cours, sûrement.
‒ Tu
voudrais pas qu’on se voie ? C’est mon jour de congé
aujourd’hui. On pourrait le passer ensemble, non ?
Et,
une demi-heure plus tard, on était attablés, tous les deux, devant
un café crème.
‒ Je
suis désolée.
‒ Chut !
On
n’en parle plus. Qu’est-ce tu veux qu’on fasse plutôt ?
‒ Je
sais pas. Il y a rien d’ouvert encore. On se promène un peu ?
‒ Allez !
On
est descendus vers la rivière. Qu’on a longée jusqu’au moulin.
On s’est enfoncés dans le bois à droite. Nos mains se sont
effleurées au rythme de la marche. Une fois. Deux fois. Se sont
jointes. Enlacées. On s’est souri.
‒ Je
suis bien avec toi.
‒ Moi
aussi.
On
s’est arrêtés. On
s’est fait face. Les
yeux dans les yeux. Nos lèvres se sont rapprochées.
Jointes. On s’est serrés l’un contre l’autre. Enlacés.
Les pointes de ses seins
se sont dressées contre mon torse.
On
a roulé dans l’herbe. Je
l’ai impatiemment cherchée sous son pull. Sous son soutien-gorge.
Sous sa jupe. Dans sa culotte. Elle
m’a fiévreusement cherché sous mon pantalon. Qu’elle
a fait glisser. Ses mains
se sont posées sur
mes fesses dénudées.
‒ Elles
sont encore toutes
chaudes.
Et
ses yeux se sont embrumés.
‒ Viens !
Oh, viens !
Son
plaisir, presque aussitôt. Et
puis le mien.
On
est retombés.
J’ai
étouffé un gémissement.
‒ Mais
reste sur le ventre ! Qu’est-ce tu fais ? Reste sur le
ventre ! Forcément sinon, ça !
Elle
s’est appuyée sur un coude.
‒ Comment
t’es arrangé ! Impressionnant ! De quand ça date ?
‒ D’hier.
Elle
y a passé un doigt.
‒ Il
y a une autre dessous en plus. Au martinet, celle-là. Comment t’as
dû déguster ! T’as crié ? Oh,
ben si, attends ! Forcément que t’as crié. Ça peut pas être
autrement. Quand on en prend une comme ça ! Ils criaient, mes
frères. À chaque fois. Surtout Martial. Ugo aussi, mais surtout
Martial. Il a une voix qui porte drôlement en plus. Tous les voisins
pouvaient en profiter. Et ils devaient pas s’en priver. Et
puis alors qu’est-ce qu’ils pouvaient gigoter ! Ils
pouvaient pas s’empêcher. Et ça leur montrait tout souvent. Mais
tout ça, les cris, les pleurs, les supplications, leurs jambes qui
s’agitaient dans tous les sens, ça l’impressionnait pas, ma
mère. Au contraire, même. Souvent, elle leur en rajoutait une
couche en prime. Ben, qu’est-ce tu veux ? Quand on a mérité,
on a mérité, hein ! Et faut reconnaître qu’ils faisaient ce
qu’il fallait pour. Ça, on peut pas dire le contraire. L’un
comme l’autre. Toi aussi, j’imagine, non ?
Il
y a eu des voix, brusquement, sur le chemin derrière. On s’est
rhabillés en toute hâte.
Ils
brillaient ses yeux. Comment ils brillaient !
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