mercredi 25 mars 2020

Premières armes (15)


Quand je suis sorti de la chambre, elles m’ont bruyamment applaudi.
‒ Quelle prestation !
‒ Félicitations !
‒ T’es vraiment très doué.
Et elles ont voulu voir. Elles se sont penchées, toutes les trois, sur mon derrière. Des mains s’y sont posées. L’ont parcouru. Reparcouru. Des doigts s’y sont enfoncés. Des ongles. Qui m’ont arraché des gémissements. M’ont fait me cabrer. Elles ont ri.
‒ Tu vas pas pouvoir s’asseoir d’un moment
‒ Il a que ce qu’il mérite, hein !
‒ Et même que ça aurait été moi, je peux vous dire qu’il s’en serait pas tiré à si bon compte.
‒ Ah, ça, moi non plus !
‒ Attends que ce soit mon tour ! Attends ! Il va voir ce qu’il va voir

Elles ont fini par partir. Et Margaux m’a demandé, tout sourire…
‒ Alors ? Qu’est-ce tu penses de mes amies ? Sympathiques, non ?
J’ai vaguement bredouillé quelque chose.
‒ Elles gagnent à être connues, tu verras.
Peut-être, oui. Mais, dans l’immédiat, ce n’était pas ce qui me préoccupait au premier chef. Ce qui me préoccupait, c’était Julie. Je redoutais qu’elle m’en veuille, quoi qu’elle en ait dit sur le moment, de la façon plus que cavalière dont je l’avais plantée là, alors que c’était moi qui avais sollicité la rencontre. En plus !

Et je me suis éclipsé pour l’appeler.
‒ Julie ? Je suis désolé pour tout à l’heure.
‒ Pas grave…
‒ Oh, si, c’est grave, si ! Tu m’en veux pas trop ?
‒ Non. Bien sûr que non !
‒ T’es toujours dispo, là ?
Elle l’était. Et je me suis précipité.

Je me suis assis, en face d’elle, avec mille précautions.
‒ Ça va pas ?
‒ Si ! Si !
Je me suis encore répandu en excuses.
‒ Tu vas pas passer toute l’après-midi à ça non plus !
‒ Non ! Bien sûr que non !
Elle avait raison. Trop, c’était trop. Qu’est-ce que je pouvais être lourd par moments ! D’agacement contre moi-même, je me suis agité sur ma chaise. Ce qui m’a arraché une grimace de douleur. Et un petit gémissement que j’ai très vite étouffé. Tant bien que mal.
Elle m’a jeté un long regard étonné, sourcils froncés. S’est très vite reprise.
‒ Bon, mais… et ta mère ? C’était pas trop grave ?
Oh, non ! Non ! C’était arrangé, ma mère.
Un supplice, le moindre mouvement… Un supplice. Et j’ai encore laissé échapper un gémissement.
Elle a planté ses yeux droit dans les miens.
‒ Oh, toi, tu t’es pris une fessée.
J’ai pris un air scandalisé.
‒ Hein ? Quoi ? Mais jamais de la vie !
Elle a ri.
‒ Oh, si ! Si ! Je reconnais les symptômes, attends ! J’ai l’habitude. C’est suffisamment souvent que j’ai vu mes frères aînés s’en prendre… Les deux.
J’ai encore voulu protester. Avec beaucoup moins de conviction.
‒ Je n’ai pas
Elle a ignoré mon interruption. Elle a poursuivi.
‒ Oui, les deux. Martial jusqu’à dix-neuf ans. Et Ugo jusqu’à vingt. C’était amplement mérité. Là-dessus il y a pas photo. Et ça s’est avéré redoutablement efficace. D’autant que c’était devant moi que ça se passait. Ils supportaient pas. Comment ça les vexait !
Elle s’est perdue quelques instants dans ses pensées.
A brusquement demandé.
‒ Et toi ? Pourquoi tu l’as eue ? Qu’est-ce t’avais fait ?
‒ Je
‒ Oh, mais t’es pas obligé de me le dire, hein ! Pas maintenant. Plus tard. Quand tu sentiras que c’est ton moment.
Elle m’a pris la main par-dessus la table.
‒ C’est pas facile, je sais ! Mais ce qu’il faut que tu te dises, c’est que plus tard tu la remercieras, ta mère. Si ! Si ! Tu verras

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire