« Ta mère m’a appelée.
Ça
a été la première chose. Tout de suite. Avant même de me tendre
les lèvres pour me dire bonjour.
‒ Oui,
elle m’a appelée. Viens là !
Près
d’elle, sur le lit. Où
je me suis étendu, sur le ventre, avec mille précautions.
Elle
a ri.
‒ Oui,
hein ! Je sais. Tu viens encore de t’en prendre une. Et
carabinée.
Elle
a redressé son oreiller. L’a tapoté.
‒ En
douce que j’en ai appris de belles sur ton compte…
J’ai
intérieurement soupiré.
Qu’est-ce
que Margaux avait bien pu aller lui raconter ?
‒ Ah,
tu caches bien ton jeu, ça, on peut pas dire !
‒ Quel
jeu ?
‒ Fais
bien l’innocent !
Elle
s’est tournée vers moi. S’est appuyée sur un coude.
‒ Montre-moi !
Allez !
J’ai
dégrafé mon pantalon. Me suis soulevé pour le faire glisser. Avec
le boxer.
‒ Plus
bas !
Jusqu’en
haut des cuisses.
‒ Ah,
oui, dis donc ! Oui.
Elle
m’a
posé la main sur une
fesse. A enfoncé un
doigt. Un autre.
‒ Ça
te fait mal ?
‒ Un
peu.
Elle
a éclaté de rire.
‒ Un
peu ? Tu dois déguster, oui. Vu l’état dans lequel t’as le
derrière. Mais je vais sûrement pas te plaindre. Vu la façon dont
tu t’es comporté…
L’autre
fesse. Sur laquelle elle a fait courir son ongle.
‒ Elle
est encore plus rouge, celle-là ! Et quand je dis rouge, c’est
carrément écarlate, oui !
Elle
y a creusé un sillon. Du bout de l’ongle.
J’ai
serré les dents pour ne pas crier.
‒ Et
quand je pense que t’as eu
le culot de lui soutenir
que c’était injuste. Que tu l’avais pas méritée, cette
fessée ! Elle est gentille, ta mère, moi j’trouve !
Elle est gentille. Parce qu’il y en a beaucoup d’autres, elles
t’en auraient collé une deuxième par-dessus pour t’apprendre à
nier l’évidence. Et à
tenir tête.
Elle
a gardé un long moment le silence. Et
puis…
‒ Tu
n’as rien à me dire ?
À
lui dire ? Non. Quoi ? Je voyais pas.
‒ Vraiment
pas ?
‒ Non.
Non. Je t’assure.
‒ Parce
qu’on a parlé, ta mère et moi, figure-toi ! Alors il y a ce
que tu as fait. Et la façon dont tu t’es comporté. Dont
tu te comportes. Qui l’oblige à sévir. Chaque fois que
nécessaire. Mais il n’y
a pas que ça… Camille,
ça te dit rien ?
‒ Camille ?
Non. Je vois pas.
‒ T’en
as pas marre de te foutre de moi ?
‒ Mais
je me fous pas de toi. C’est quoi, toute cette histoire ?
‒ C’est
que c’est une fille avec qui tu couches, Camille. Voilà ce que
c’est.
‒ Mais
jamais de la vie enfin ! C’est
juste la fille d’une femme que connaît ma mère.
‒ Et
devant qui elle t’a donné une fessée, oui, je sais. Et une fessée
amplement méritée. Mais il y a pas eu que ça. Il y a eu qu’après
tu l’as revue, cette Camille. Que tu la revois. Que t’arrêtes
pas de la revoir. Et que tu couches avec.
‒ Je
te jure que…
‒ Tu
mens ! Tu mens !
‒ Mais
non, je mens pas, non ! Comment faut te le dire ?
‒ Dis
tout de suite que c’est ta mère qui ment alors…
‒ C’est
pas qu’elle mente, mais vous vous êtes mal
comprises, sûrement.
C’est obligé. Ça peut pas être autrement…
‒ Ben,
voyons ! Bon, alors
tu sais pas ? On va
s’en tenir là tous les
deux. Et tant que tu seras
pas décidé à me dire la vérité, inutile
de revenir. Ou
de m’appeler. Parce qu’à
la limite que tu la
sautes, j’en
ai rien à battre. Tu me
dois rien. On s’est rien promis. Seulement
si tu me mens là, tu me mentiras d’autres fois. Tu me mentiras
pour plein de choses. Tout le temps. Je saurai jamais sur quel pied
danser avec toi. Jamais. Et ça, je le supporterai pas.
‒ Mais
je te mens pas.
‒ Fous
le camp, va ! Fous le camp. Ça vaudra mieux.