Je me suis précipité dans la chambre de Camille.
Elle était assise à son ordinateur.
– T’es allée tout lui raconter à Célestine, hein !
– D’abord, pour commencer, tu pourrais frapper.
– Parce que tu frappes, toi, quand tu rentres dans ma
chambre ?
– C’est pas pareil. Dix mille fois, je l’ai vu,moi, ton
cul. Et en couleurs en plus.
– C’est toi qui l’as fait venir. Pour me piéger. C’est
ça, hein !
– Si tu veux que je te réponde, tu sors et tu frappes.
Ce que j’ai fait en maugréant.
– Entre !
– Tu peux m’expliquer ?
Elle s’est levée.
– Oui, c’est moi qui ai mis Célestine au courant !
Oui. Dans ton intérêt.
– Ben, voyons !
– Parfaitement, oui. Dans ton intérêt. Parce que tu la
connais pas, Clémence. Elle est toxique, cette fille. Elle allait
t’embringuer dans tout un tas de trucs dont tu ne serais
certainement pas ressorti indemne !
– Oh, tu parles !
– Eh, si ! Elle n’a aucune limite. Elle fait ce qu’elle
a envie. Comme elle a envie. Quand elle a envie. En prenant des
risques inconsidérés. Je pourrais t’en raconter pendant des
heures et des heures là-dessus, si je voulais. Ça parle, les filles
entre elles. Elle a déjà eu des tas d’ennuis. Elle t’en aurait
fait avoir. Et de sérieux. Parce que te connaissant comme je te
connais, t’aurais été incapable de dire non. Tu te serais laissé
entraîner. D’autant plus qu’au final t’es comme elle.
Exactement comme elle. Dès qu’il s’agit de mater, il y a plus
rien qui te retient. Et t’aurais donné, tête baissée, dans tous
les panneaux qu’elle t’aurais tendus. Seulement t’es mon frère.
Et je n’ai pas du tout envie d’être obligée d’aller te porter
des oranges en prison.
– Rien que ça ! Tu crois pas que t’exagères ?
– Non, j’exagère pas, non !
– Tu peux pas la voir, c’est ça, hein ! Qu’est-ce
qu’elle t’a fait ?
– Mais rien du tout !
– On dirait pas !
– Et toi, pourquoi tu tiens tellement à la défendre ?
Elle t’a tapé dans l’œil ?
– N’importe quoi !
– Alors je te signale, à toutes fins utiles, qu’elle est
lesbienne, Clémence. Résolument lesbienne. Exclusivement lesbienne.
Et lesbienne conquérante. Il y a des tas de filles qui te le diront.
– Ah, je comprends mieux. Elle marche dans tes plates-bandes
en fait.
– T’es vraiment très con quand tu t’y mets.
– Je sais pas. On peut se demander. Remontée comme tu es
contre elle.
– N’importe comment, c’est pas le problème, Clémence. Le
problème, c’est qu’il fallait bien que tu sortes, d’une façon
ou d’une autre, de cette situation. Qui pouvait pas s’éterniser
comme ça encore des mois et des mois. Tu pouvais pas continuer à te
prendre indéfiniment des fessées en veux-tu en voilà et à être
la risée de toute la fac. Parce que tu sais pas tout. Et je peux te
dire qu’il s’en fait partout des gorges chaudes du cul tanné de
Raphaël. Et que ça a pris des proportions !
– Ce à quoi tu as largement contribué, non ?
– Pour te faire réagir. Et Dieu sait si je m’y suis
employée. Dans l’espoir que tu finirais par prendre, de toi-même,
le taureau par les cornes et par dire la vérité à Célestine.
Parce que c’était la seule solution. Parce que c’était par elle
qu’elles te tenaient et par la peur viscérale que tu avais
qu’elles la mettent au courant. Mais comme réagir, c’était
manifestement au-dessus de tes forces, il a bien fallu que je m’y
colle et que je monte au créneau.
– Et maintenant, résultat des courses, Célestine m’en veut
à mort.
– Qu’elle t’en veuille, ça, c’est sûr ! Et c’est
bien un peu normal, non ? Mais tu sais de quoi elle t’en veut
le plus ? Et de loin. C’est de ne pas lui avoir fait
confiance. C’est d’avoir pu penser qu’elle ne comprendrait pas.
Qu’elle ne pardonnerait pas.
– Tu crois que je peux rattraper le coup alors ?
– Franchement, oui ! À condition de faire profil bas. Et
à condition de pas te remettre à mater à la première occasion.
– Oui, oh, ben ça, ça coule de source ! Pas question
que j’y remette le nez, alors là !
– Sois pas trop sûr de toi, va ! Parce que si le bât
risque de blesser, c’est bien de ce côté-là…
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