mercredi 2 octobre 2019

Sévères voisines (26)


Je passais désormais la plupart de mes nuits en compagnie d’Emma que je convoquais en secret dans la chaleur de mes draps. Emma que j’avais entendue rugir de plaisir, derrière moi, sans pouvoir la regarder jouir. Emma que j’avais vue nue, à l’automne, dans sa salle de bains. Emma dont, quand je fermais les yeux, je revoyais les seins si lourds, si imposants. Aux pointes qui se dressaient avec arrogance quand elle dirigeait sur elles le jet de la douche. Quand elle l’y laissait complaisamment séjourner. Emma dont les replis rosés s’aventuraient hardiment à l’extérieur de son encoche. Que je crevais d’envie de revoir entièrement nue, pour de bon, pour de vrai, malgré tout ce qu’il m’en avait coûté. Ce qui, je le savais, était, pour le moment du moins, parfaitement inenvisageable. À moins de courir des risques insensés.
Je faisais aussi venir Manon dont j’avais, à maintes reprises, pu contempler tout à loisir les adorables petites fesses. Mais moins souvent. Subrepticement. Un peu comme si j’avais redouté qu’elle ne me perce à jour et qu’elle ne vienne me reprocher avec virulence et force claquées le traitement que je lui imposais en cachette.
Et puis il y avait les autres. Jasmine. Johanna. Dont j’ignorais comment elles étaient faites. Dont je m’efforçais de deviner furtivement les seins et les fesses sous les vêtements. Dont je me demandais douloureusement si elles se mettaient la fente à découvert. Que j’étais pris de l’irrépressible envie de contempler à leur tour dans leur nudité intégrale.
J’ai résisté. C’était trop dangereux. Trop risqué. Que, pour une raison ou pour une autre, je sois démasqué et mon compte serait bon. Je vivrais l’enfer. Déjà que…
J’ai résisté. Autant que j’ai pu. Pas beaucoup. Pas longtemps. J’avais vraiment trop envie.
Et j’ai appelé Clémence.
– Ça tient toujours ta proposition ?
– Ma proposition de… ? Mater ensemble ? Évidemment que ça tient. Évidemment ! Plus que jamais… Viens demain ! C’est mardi en plus !
– Mardi ?
– Tu te rappelles pas ? C’est le mardi qu’elle le fait cocu, son Léo, Johanna. Dans l’appart juste à côté du mien.

Et le lendemain, en tout début d’après-midi, j’ai débarqué chez elle.
– Que je suis contente, tu peux pas savoir ! Depuis le temps que je rêvais de vivre ça avec un mec… Tiens, viens !
À la fenêtre. Côte à côte.
– Elle va arriver.
– Et pour Jasmine ? T’avais dit…
– Qu’on pourrait la voir à poil. J’avais dit, oui. Mais alors là, il faut que tu me jures le secret le plus absolu.
J’ai juré.
– Elle fait du hand, Jasmine. Et après, avant de repartir, elle prend une douche.
– Je vois…
Elle a ri.
– Pas encore, non, mais tu verras. On verra. Depuis une petite pièce de rangement à côté. D’où on aura une vue imprenable sur elle et sur ses petites camarades. Sans que personne puisse s’en rendre compte.
– Et ce sera quand ?
– Je te dirai… Tiens, en attendant, regarde ! Là v’là, Johanna.
Elle arrivait, effectivement. Sur le trottoir d’en face. Enveloppée dans un grand manteau rouge. D’un pas pressé.
– Viens !
Dans sa chambre.
– C’est de là qu’on entend le mieux. Et ça perd pas de temps avec elle. Je te parie ce que tu veux qu’il se passera pas dix minutes avant qu’elle se soit mise à pousser la chansonnette à tue-tête.

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