mercredi 24 juillet 2019

Sévères voisines (16)


On m’a appelé sur le campus.
– Hou ! Hou ! Raphaël !
C’était Manon.
– Écoute ! Viens voir là !
Il y avait une autre fille avec elle.
– C’est Johanna. Une copine. Dis-lui !
Je l’ai regardée, interloqué.
Que je lui dise ? Mais que je lui dise quoi ?
– Ce qu’on te fait, Emma et moi. Elle veut pas me croire.
Je me suis dandiné, d’une jambe sur l’autre.
Que je…
– Ben alors ? Qu’est-ce t’attends ? Grouille !
J’ai baissé la tête.
– Elles me mettent des fessées.
– Ah, tu vois, Johanna ! Tu vois que c’est pas des mythos.
La fille a éclaté d’un rire moqueur. Offensant.
– Non, mais j’hallucine, là ! J’hallucine complètement.
– Et je peux te dire que pour être de la fessée, c’est de la fessée…
 Et il se laisse faire ?
– Bien obligé, tiens ! Il a pas le choix. S’il veut pas que ça s’ébruite ce qu’il a fait…
 Eh ben, dis donc !
Elle a encore ri.
Et elles se sont éloignées.

Au resto U, à midi, elle est venue, Manon, comme souvent, s’installer à ma table.
– Comment ça l’a impressionnée, Johanna, tout à l’heure ! Et toi, comment t’avais honte !
J’ai piqué du nez dans mon assiette.
– Regarde-moi ! Allez, regarde-moi !
J’ai relevé la tête.
Elle m’a fixé droit dans les yeux.
– J’adore ça quand t’as honte… Comme là encore, en ce moment.
Elle a croqué un radis. Un autre.
– Et il faut que t’aies honte. C’est le seul moyen pour te faire passer, une bonne fois pour toutes, tes sales habitudes. Il y a que ça qui marche avec un mec. La honte. Vous êtes tellement fiers. Tellement imbus de vous-mêmes. Et alors quand ça vient d’une nana. En plus! Oh, mais là, je peux te dire que je vais te la coller, la honte. Tant et plus. Tant et si bien que t’auras plus envie d’aller reluquer qui que ce soit dans les salles de bain. Ni ailleurs. Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?
– Non. Rien.
– Mais si ! Il y a quelque chose. Je le vois bien. Alors accouche !
– Cette fille, là…
– Johanna.
– Oui.
– De quoi t’as peur ? Qu’elle sache pas tenir sa langue ? Mais non ! Tu penses bien que s’il y avait le moindre danger de ce côté-là… Non. J’ai une absolue confiance en elle. Tu verras par toi-même, d’ailleurs. Quand tu la connaîtras mieux.
– Comment ça, quand je la connaîtrai mieux ?
 Ah, ben oui ! C’est vrai, je t’ai pas dit. Je vais t’en coller une devant elle. Bientôt… Je lui ai promis, là, tout à l’heure, quand on s’est quittés. Je te dis pas comment elle a hâte. Elle s’en fait une de ces fêtes ! Et elle est moqueuse, Johanna, mais moqueuse d’une force ! Je sens qu’on va bien s’amuser.

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