mercredi 17 juillet 2019

Sévères voisines (15)


Camille est entrée en trombe dans ma chambre. En terrain conquis.
– Tu pourrais frapper quand même !
– Parce que ? Tu pourrais être à poil ? Oh, tu parles, je l’ai déjà vu, ton cul ! Et même… bien rouge.
Je me suis agacé.
– Bon, qu’est-ce tu veux ?
Elle s’est laissée tomber de tout son long sur mon lit.
– Rien. Rien de spécial. Juste discuter un peu. Entre frère et sœur. Tu faisais quoi, là ?
– Je bossais. Enfin, j’essayais.
– Oui, oh, t’as bien le temps. Eh ben moi, tu sais avec qui j’ai passé l’après-midi ? Devine…
– Qu’est-ce que tu veux que j’en sache ?
– Manon.
– Ah…
– Elle est super sympa comme fille en fait. Qu’est-ce qu’on a parlé ! Et rigolé. Elle m’a dit pour ce matin. Que tu t’en étais encore pris une. Et sévère. T’as mal ?
– Ça va.
– Oh, alors là, ça m’étonnerait. À mon avis, tu dois déguster. Vu ce qu’elle m’a raconté. Comment elle t’a cinglé Emma. Et vu les grimaces que tu fais dès que tu bouges… Oh, mais je te plains pas, hein ! C’est largement mérité. Parce que toutes les histoires que t’es allé inventer, là, de soi-disant trucs que t’aurais piqués chez elles, cet été. Eh ben, elle m’a dit qu’il y a rien de vrai là-dedans. Que c’est du pipeau. Non, en fait t’es un gros cochon, mais ça, je m’en doutais. Rien qu’à la façon dont tu regardes les filles sur la plage. D’autres trucs aussi. Je suis sûre qu’au camping, l’an dernier, quand t’arrêtais pas de disparaître dans le petit bois derrière, t’allais mater quelque part. Il y a plein de choses qui me reviennent maintenant. Et mes copines ! Il y en a certaines, c’est clair qu’elles y ont attrapé. C’est dégueulasse. T’es vraiment dégueulasse. Mais putain, vous pouvez pas leur foutre la paix, vous, les mecs, au nanas ? Faut que vous soyez sans arrêt à baver derrière. C’est pas possible, ça ! Ah, non, elles ont mille fois raison, les voisines ! Qu’elles t’en mettent des branlées ! Qu’elles t’en mettent ! Tant et plus. Que ça te fasse passer l’envie d’aller emmerder le monde. Une bonne fois pour toutes. Si c’est possible. Parce que ça, c’est pas gagné. En tout cas, elles sont gentilles, j’trouve. Parce que moi, à leur place, j’aurais mis la mère et Célestine au courant.
Je me suis dressé d’un bond.
– Tu vas pas le faire ?
– Je suis pas une balance. Mais j’en pense pas moins.
Elle s’est relevée, approchée de la fenêtre, penchée.
– C’est sûr ? Tu vas pas le faire ?
– T’y retournes ?
– Où ça ?
– Ben, les mater, tiens ! Par la fenêtre de leur salle de bains.
– Oh, non, non ! Je pourrais pas n’importe comment. Elles l’ont arrangé, le store.
– Et comment tu le sais ?
– Je me doute. C’est ce que n’importe qui, à leur place…
– Mouais… Et d’autres filles, ailleurs ?
– Non plus, non.
– C’est ça… je vais te croire.
– Ah, si, si ! Je t’assure…
– Tu sais ce qu’elles pensent à côté ? C’est que, tant qu’elles vont te maintenir la pression, t’en coller comme t’en coller, tu vas filer droit. Par trouille. Qu’elles mettent la mère au courant. Et Célestine. Et plein d’autres gens avec. Mais que, par contre, le jour où elles lâcheraient l’affaire, où elles te laisseraient la bride sur le cou, tu recommencerais exactement comme avant. Pareil. Tu pourrais pas t’empêcher. Parce que c’est plus fort que toi. C’est pour ça : tu peux t’attendre à les avoir un sacré moment sur le dos… Et on peut pas leur donner tort.

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