– Tu
dis rien ?
Il
venait de partir, le type. Et elle, d’enfiler un peignoir. Vert à
petites fleurs roses.
– Hein ?
Tu dis rien ? T’es choqué, c’est ça ?
– Choqué ?
Bien sûr que non. Pourquoi je serais choqué ?
– Parce
que je lui reproche de bander. Que je le lui interdis. Que t’es un
mec. Et que bander, c’est le genre de truc à quoi un mec il tient
plus qu’à n’importe quoi au monde.
– Faut
reconnaître qu’il pouvait difficilement prétendre qu’il bandait
pas.
– En
fait, c’est quelqu’un qui voudrait absolument réussir à se
maîtriser de ce côté-là.
– Ça
risque de pas être simple…
– Si
j’ai bien compris, mais j’ai pas cherché à approfondir non
plus, si j’ai bien compris, il est soumis à des tentations
auxquelles il est impératif pour lui de parvenir à résister. Il a
donc sollicité mon aide.
– Que
tu as généreusement consenti à lui apporter. Quelle bonne
Samaritaine tu fais !
– Fiche-toi
bien de moi ! Non, il est bien évident que si je n’y avais
pas trouvé mon compte…
– Et
largement… Ah, tu y es pas allée de main morte. Il va pas pouvoir
s’asseoir d’un moment, le pauvre homme !
– C’était
pas la mer à boire non plus.
– Enfin…
– Il
s’en remettra.
– On
se remet toujours de tout. En tout cas, ce qu’il y a de sûr, à te
voir faire, c’est que tu prends un pied pas possible à mettre des
derrières en feu.
– Je
n’ai jamais prétendu le contraire, mais, au risque de te
surprendre, ce n’est pas ce qui est vraiment essentiel à mes yeux.
– Ah,
oui ? Et c’est quoi alors ?
– Moi,
tu sais, dès qu’il y a un challenge à relever…
– Et
celui-là, il est de taille.
– Mais
surtout, il me parle. Parce que, quand t’es une femme, c’est sans
arrêt… sans arrêt… sans arrêt qu’ils t’emmerdent avec leur
queue, les mecs. D’une façon ou d’une autre. Ils sont totalement
incapables de se réfréner là-dessus. Et, au quotidien, ça te
pourrit littéralement la vie. Alors, quand il t’en tombe un entre
les pattes, bien décidé à faire de louables efforts pour modifier
son inacceptable comportement dans ce domaine, faudrait être
complètement stupide pour ne pas sauter sur l’occasion.
– Je
vois. En somme, tu ne choisis jamais tes victimes au hasard.
– Jamais.
Quand on a l’embarras du choix, on peut se permettre d’être très
sélective.
– Et
Julien, lui alors, quels ont été les critères ?
– Oh,
Julien ! C’est tout un poème, Julien. Au départ, je l’avais
éliminé. Il a insisté, m’a adressé d’interminables missives.
J’ai fini par le trouver attachant et par lui soupçonner, à tort
ou à raison d’avoir des tendances homosexuelles dont il n’a
absolument pas conscience. Et je me suis lancé pour défi de les
faire progressivement remonter à la surface. Et de l’amener à les
accepter.
– Vaste
programme ! Et… d’autres challenges en vue ?
– Bien
sûr.
– Qui
sont ?
– Ah,
ça, cher ami, c’est encore mon secret. Chaque chose en son temps.
Et, pour l’heure, ce qui est d’actualité, c’est Charles. Qui
fera sa réapparition tout à l’heure quand les douze heures
fatidiques se seront écoulées. Tu seras là ?
– Si
ma présence t’est encore indispensable.
– Elle
l’est.
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