Camille m’attendait, tranquillement installée sur mon lit, les
mains sous la nuque.
– Non, mais faut pas te gêner. Ça va ? Je te dérange
pas ?
– Pas vraiment, non. T’étais où ?
– Si on te le demande…
– Je dirai que je le sais. Quoi ? Qu’est-ce qu’il y
a ? Qu’est-ce que t’as à me regarder comme ça ?
– Tu…
– Je le sais, oui. T’étais au stade en train de mater les
filles du hand à poil sous la douche.
J’ai voulu nier.
– Hein ? Mais qu’est-ce que c’est que cette
histoire ?
– Je vous ai vus. De mes yeux vus. Ce dont vous ne vous êtes
absolument pas rendu compte. Vous étiez bien trop occupés à vous
rincer l’œil. Et à vous palucher.
J’ai désespérément cherché à retourner la situation à mon
avantage.
– Alors comme ça, tu me suis. Tu m’espionnes. Ah, ben
bravo ! Bravo !
– Je t’espionne pas. Je te surveille. Pour t’empêcher de
faire des conneries. Nuance. Et j’ai bien raison. La preuve !
Elle s’est redressée, assise au bord de mon lit.
– En douce que tu t’es mis dans de sacrés beaux draps.
Parce qu’elle va être contente Célestine quand elle va apprendre
que tu fricotes avec une autre.
– Je fricote pas avec.
– Ah, non ? Oh, ben tu lui expliqueras alors… Tu lui
expliqueras que là, vous étiez juste en train de vous branler
gentiment en chœur, mais que le reste du temps, quand vous êtes
ensemble, vous enfilez des perles. Elle va te croire, sûrement.
– N’empêche que c’est vrai.
Elle a ignoré l’interruption.
– Et les filles ! Manon. Emma. Johanna. Jasmine. Elles
vont être ravies, les filles ! Surtout Jasmine. Que t’as pas
dû te gêner pour reluquer tant et plus. Ah, là, tu peux t’attendre
à une de ces corrections avec elle… Et c’est pas tout. Parce
qu’elle va forcément en parler à ses copines du hand. Qui, elles,
ne se contenteront sûrement pas de te tambouriner le derrière, mais
qui, à tous les coups, vont vouloir porter plainte. Non, cette
fois-ci, tu t’en tireras pas comme ça, mon coco. Ça va prendre de
sacrés proportions tout ça, probable.
– Camille…
– Quoi, « Camille » ? Quoi ? Tu veux que
je la ferme, c’est ça ? Que je te couvre, une fois de plus?
Eh ben non, non ! J’en ai marre, figure-toi ! Mais marre
à un point que t’as même pas idée. Alors, ce coup-ci, c’est
bon. Ça suffit.
– Tu peux pas faire ça.
– Bien sûr que si que je peux… Et pourtant non, t’as
raison, je vais peut-être pas le faire. C’est ça le pire. Parce
que t’es mon frère. Parce que si on te colle un procès au cul, ce
qui est vraisemblable, ça va te suivre toute ta vie. Parce que ça
te portera préjudice, plus tard, dans ton boulot. Et parce que,
d’une certaine façon, ça va nous retomber dessus, à maman et à
moi. Alors non, je vais peut-être pas le faire. Tout va dépendre de
Clémence, en fait.
– De Clémence ?
– De Clémence, oui. C’est elle qui va te corriger. C’est
pas une excellente idée, ça ? Une bonne cinglée. À la
ceinture. Sur les fesses et sur le dos. Et alors, de deux choses
l’une : ou bien elle va prendre son rôle bien à cœur, je
serai satisfaite de sa prestation et, pour cette fois, je passerai
l’éponge. Au moins momentanément. Ou bien elle va te ménager,
retenir ses coups et alors là, je n’aurai pas le moindre état
d’âme. On saura tout. Tout le monde.
– Mais…
– Mais quoi ? Qu’est-ce tu vas me dire ? Qu’elle
est au moins aussi coupable que toi ? Et alors ? Tu ne l’es
pas moins pour autant. Si ? Et, de toute façon, c’est moi qui
décide. C’est à prendre ou à laisser. Allez ! Tu
l’appelles…
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