mercredi 11 septembre 2019

Sévères voisines (23)


– Tu me reconnais pas ?
Ah, si, si ! Clémence.
Qui m’attendait à la porte de l’amphi.
– Je savais bien que je finirais par te trouver dans le coin. Non, parce que leur demander ton 06 à elles, je voulais pas. Pas question qu’elles sachent. Bon, mais t’as le temps, là ? On peut aller boire un coup ?
On pouvait, oui.

Une table tout au fond. À l’écart.
– Tu t’attendais pas à ça, hein, l’autre soir, que je te demande pour son minou à Manon.
– J’avoue que…
– Moi aussi, je suis curieuse, qu’est-ce tu veux ! Et j’adore ça voir comment les autres nanas sont faites. Toutes. Mais encore plus si c’en est que je connais. Et quand j’en ai une dans le collimateur, alors là je peux t’assurer que je suis pas du genre à lâcher le morceau. Faut que j’arrive à mes fins. Toutes affaires cessantes. C’est pour ça : quand j’ai su pour toi, que je t’ai vu, je me suis dit qu’on pourrait peut-être coopérer tous les deux. S’entraider pour assouvir notre commune passion. Que ça pourrait être super génial. Non ? Tu crois pas ?
Peut-être. Je savais pas. À brûle-pourpoint comme ça…
– T’as peur de te faire encore gauler, c’est ça, hein ? Je te comprends. Parce qu’elles te font payer la note, là. Et cher. Elles s’en donnent à cœur joie. Mais c’est pas parce que ça t’est arrivé une fois que ça doit forcément recommencer. Regarde, moi ! Ça fait des années et des années que je passe le plus clair de mon temps à mater. Eh ben, j’ai jamais eu vraiment de problèmes. Et pourtant j’ai pris de sacrés risques. Bon, mais c’est vrai aussi qu’il y a des jours il s’en est fallu de peu. C’est pas passé loin. C’est pour ça : si on fait alliance tous les deux, ce sera pain bénit. Il ne viendra à l’idée de personne qu’on puisse être en train de reluquer en couple. Surtout si on sait bien donner l’illusion qu’on n’est préoccupés que de nous-mêmes.
Vu comme ça. Oui, mais quand même. Quand même…
– Me dis pas qu’une fille comme Jasmine, ça te tente pas de la voir à poil…
– Jasmine ! À poil !
– Jasmine, oui ! De corps, elle est hyper bien foutue, je suis sûre.
– Mais…
– Comment je compte m’y prendre ? J’ai ma petite idée, t’inquiète ! Suffit juste de la creuser encore un peu. Mais on devrait y arriver. Et il y a pas que ça ! Johanna…
– Quoi, Johanna ?
– Tu lui donnerais le bon Dieu sans confession, hein, elle, à la voir comme ça tout amoureuse de son Léo. Eh bien Johanna elle s’envoie en l’air, en prime, avec mon voisin de palier. Tous les mardis. L’après-midi. Et quelquefois aussi le jeudi.
– T’es sûre que c’est elle ?
– Certaine. Je la vois par la fenêtre quand elle arrive. Et quand elle repart. Mais elle ignore que c’est moi à côté. Et faut surtout pas qu’elle sache. Cela étant, si ça te dit de l’entendre couiner, t’es bien évidemment le bienvenu. Entendre, c’est pas mal aussi. Surtout qu’elle en est de la comédie. Et qu’elle a de la voix. Bon, mais c’est pas tout ça. Faut que j’y aille. J’ai cours. C’est quoi, ton numéro ?
Elle l’a enregistré. A fait sonner mon portable.
– Que t’aies aussi le mien.
Elle s’est levée.
– Tu réfléchis à tout ça et tu me tiens au courant ?

Réfléchir ? C’était tout réfléchi. Parce qu’elle avait beau dire, Clémence, si je me faisais prendre, j’étais mort. Ce coup-là, elles ne me louperaient pas. Elles mettraient Célestine et ma mère au courant. Ma sœur en tête.

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