mercredi 23 janvier 2019

Julie, artiste peintre fesseuse (24)


– Tu t’occupes de nous la contacter, cette Estelle ?
Moi, je voulais bien. Je demandais pas mieux.
– Seulement d’ici ce soir, ça risque quand même d’être un peu short.
– Je sais bien, oui. Prends tout ton temps. Fais au mieux. Ce sera quand ce sera. En attendant, je vais nous le tenir bien au chaud sur le gril, notre petit Domitien. Qu’il morfle un peu ! Chacun son tour.

Établir le contact avec Estelle n’a pas été vraiment compliqué. Je lui ai envoyé un message, en privé, pour lui dire que j’aurais aimé l’entretenir d’un certain Domitien. Message auquel elle a presque aussitôt répondu.
– Qu’est-ce qu’il a encore fait cet oiseau-là ?
Non. Rien. Enfin si, peut-être ! J’en savais rien en fait. Mais est-ce que c’était quelqu’un à qui une femme pouvait se fier ?
– Lui ? C’est la dernière des enflures ! Un enfoiré de première.
Carrément ! Elle l’avait pourtant dans sa liste d’amis.
– Pour garder un œil dessus, tiens ! C’est le genre de type dont tu sais jamais à quel moment ça va l’attraper de te la faire à l’envers.
Je trouvais qu’elle en dressait un tableau…
– Encore bien en-dessous de la vérité, je vous assure ! Si vous saviez le nombre de filles avec lesquelles il s’est montré absolument odieux. À commencer par moi.
– Ah, oui ! Comment ça ?
On s’est branchés en cam.
– Parce que ça risque d’être long.
Et elle s’est lancée.
– Vous savez ce qu’il m’a fait ? Au café, il m’a larguée. Un soir. Devant tous ses copains. En prétendant que j’étais pas un bon coup au lit. « On s’emmerde avec, les mecs. On s’emmerde comme c’est pas possible. C’est le genre à écarter les cuisses et à attendre que ça se passe. T’as l’impression de baiser un bout de bois. Ou une poupée en latex. Quant aux pipes, ben c’est en option. Il vaut mieux d’ailleurs. Parce qu’à part te baver tant et plus sur la queue… Maintenant, s’il y en a un que ça tente, je la lui laisse. C’est de bon cœur. Mais il fera pas vraiment une affaire. » Cette claque que je me suis prise ! Je m’étais investie, moi. Même si ça faisait pas beaucoup de temps qu’on était ensemble. Et il m’avait laissée faire. Il m’avait même encouragée. Il avait parlé d’avenir, de projets en commun. De plein de trucs. Alors se ramasser une rupture en pleine gueule, comme ça, devant tout le monde ! Sans que rien, absolument rien, ait pu le laisser prévoir… Mais encore ça, qu’il me plaque, c’était dur, un grand coup par la tronche, oui, mais c’était pas ça, le pire. Le pire, c’était cette volonté délibérée de m’humilier. Publiquement. Et gratuitement. Parce qu’il y avait pas un mot de vrai dans tout ce qu’il a raconté. Ça m’a fait mal, mais mal, vous pouvez pas savoir…
– Quel petit personnage infect, ce Domitien !
– Ah, ça, vous pouvez le dire… Et je suis pas la seule à avoir eu maille à partir avec. Tenez, ma copine Carla, par exemple. Avec elle aussi il est sorti. Eh bien un soir qu’ils étaient en boîte tous les deux, il en a dragué une autre sous ses yeux. Et quand je dis dragué, c’est dragué. Avec roulage de pelles et pelotage des fesses sur la piste. Mais c’est pas tout. Parce qu’en prime la fille, il s’est enfermé avec, pour la tirer, dans la voiture de Carla. Qu’était folle de rage. Mais elle a eu beau hurler, tempêter, frapper aux vitres, taper sur le capot, il en a strictement rien eu à foutre. Il a tranquillement terminé son affaire, il est descendu et il lui a jeté les clefs à la figure. « Tiens, la v’là ta tire ! Et tu te casses. Je veux plus jamais entendre parler de toi .» Et tout ça sur le parking de la boîte. Devant cinquante personnes qu’en perdaient pas une miette.
– C’est le genre d’individu à qui une bonne petite leçon ferait le plus grand bien.
– Ah, ça, c’est sûr… Et je peux vous dire que si j’avais l’occasion…
– Oui. Eh bien justement… Justement vous allez l’avoir si vous voulez. Et pas plus tard que ce soir.

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