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On
s’est voulu un petit resto toutes les trois.
– Qu’on
fasse un peu le point sur tout ça…
Oui,
mais d’abord, elle avait quelque chose à nous raconter, Jessica.
– Vous
savez, les deux filles de l’autre jour, celles de l’étage du
dessus…
– Oui.
Eh, bien ?
– Elles
sont venues me voir. Elles voulaient faire connaissance. « C’est
vrai. On est voisines et on s’ignore. C’est complètement idiot,
avouez, non ? » J’étais bien de leur avis. On a parlé.
De choses et d’autres. Et puis elles en sont rapidement venues là
où, depuis le début, elles voulaient en venir. Lancelot. C’était
qui ce type ? Mon mec ? « Ça, non, il y a pas de
risque. » Oui, ben, en attendant, comment je l’avais
dérouillé ! Il allait pas pouvoir s’asseoir d’un moment.
Et… il allait revenir ? « Oh, ça, sûrement, oui ! »
Elles n’attendaient qu’une chose, en fait, c’est que je leur
propose de descendre assister à la prochaine séance. Voire même,
de participer.
– Et
tu l’as pas fait ?
– Bien
sûr que si ! Et elles étaient absolument ravies
– Mais
c’est qui, ces deux filles au juste ?
– Deux
sœurs d’une vingtaine d’années. Deux étudiantes qu’apparemment
tout ça a singulièrement amusées. Parce que les hommes leur ont
fait tout un tas de misères, si j’ai bien compris. Comme à
beaucoup d’entre nous. Et qu’elles leur gardent, à tous dans
leur ensemble, un chien de leur chienne. D’ailleurs, elles ne sont
pas complètement novices en la matière : il y a un jeune de
leur entourage sur lequel elles ont barre – elles m’ont
promis de m’expliquer pourquoi – et qu’elles obligent
régulièrement à se punir devant elles.
– Oui,
ben je sens qu’il a pas fini de morfler notre petit Lancelot.
S’agissant
de lui, justement, Pauline avait de sérieuses réserves à émettre.
– Je
suis pas franchement certaine qu’il soit la meilleure personne
devant qui fesser Luc.
– Parce
que ?
– Parce
qu’il reçoit aussi. Que, du coup, ils vont être en empathie tous
les deux. Et c’est pas vraiment le but recherché.
– Elle
a pas tort.
– Non.
Ce qu’il nous faut, c’est quelqu’un qui soit délibérément
vexant. Qui le montre. Qui le dise. Qui le fasse sentir. Et je vois
pas franchement Lancelot dans le rôle.
– Eh
ben, faut trouver quelqu’un d’autre. Tu t’en occupes, Chloé ?
– Pourquoi
moi ?
– Parce
que tu fais ça bien. Tu sais tourner les phrases.
– Et
puis t’as le flair en plus ! Tu sens tout de suite si ça peut
le faire ou pas.
Il y
avait encore autre chose.
– Quoi,
Pauline ?
– Depuis
qu’on s’est lancées là-dedans, vous trouvez pas que c’est un
peu maigre les résultats ? Parce qu’à part Luc, justement…
– Et
Lancelot…
– Qui
compte pas. Parce qu’il adore ça se faire tanner le cul. Ce qui
correspond absolument pas à notre projet initial.
– Et
alors ? Tu proposes quoi ?
– Qu’on
relance la mécanique…
– Et
je sens que ça va encore être pour ma pomme…
– Ben
oui, Chloé, forcément ! Tu fais ça tellement bien…
Et
je m’y suis collée. En sériant les problèmes. D’abord Luc. Il
nous fallait un « moqueur » pour lui. Que j’ai fini par
dénicher, après moult tentatives infructueuses. Sa femme, après
l’avoir trompé pendant des années, venait de prendre la poudre
d’escampette avec un autre. Il était remonté comme une pendule
contre l’adultère en général et ceux qui le commettaient en
particulier. Alors voir corriger un type qui prenait un malin plaisir
à aller nicher dans le nid des autres, ah, oui, alors ! Et
plutôt deux fois qu’une. Et même, s’il le fallait, il était
prêt à manier lui-même le fouet, le martinet ou tout autre
instrument qu’on souhaiterait. Et ce serait de bon cœur.
– Et
pourquoi pas ?
Elles
n’avaient rien contre, les filles !
– Oui,
ça peut être amusant !
– Et,
pour le reste, t’as trouvé quelque chose ?
– Deux
choses même !
– Ben,
vas-y, quoi ! Raconte !
– D’abord
un type précautionneux que le diable ! Qui marchait sur des
œufs. Qui faisait un pas en avant, deux pas en arrière. Que j’ai
fini par secouer. Bon, mais c’était quoi, le problème ? Il
était marié, c’était ça ? Non, parce que s’il était
marié, moi, je mangeais pas de ce pain-là. Alors là, pas question.
Il m’a juré ses grands dieux que non. Non, c’était pas ça.
Seulement il avait une situation très en vue. Il pouvait pas se
permettre de faire n’importe quoi. Ah ! Et c’était moi le
n’importe quoi ? Sympa ! Il a essayé de se rattraper aux
branches comme il a pu. Je lui ai battu froid quelques jours. Ai fini
par me montrer conciliante. Il a repris espoir. J’ai voulu une
photo. Il a tergiversé. Différé. Bon, mais allez ! Le mieux,
c’était d’en rester là. Chacun sa route. Le lendemain, je
l’avais en pièces jointes dans ma boîte mail. Et alors, là…
Là, je vous le donne en mille…
– C’était
le président de la République.
– Mieux
que ça ! Non, mais, à votre avis, quelles sont les
probabilités pour que, sur un site comme ça, on tombe sur un type
qu’habite à cinq cents mètres de chez soi ?
– On
le connaît ?
– Un
peu que vous le connaissez…
– C’est
qui ? Ben, accouche, quoi !
– Duroc.
– Duroc ?
Le banquier ?
– Lui-même.
– Il
est marié.
– Je
sais bien, oui.
– Le
salaud ! Non, mais quel salaud ! Oui, ben alors, lui, faut
qu’il mange ! Il va voir s’il peut, comme ça, continuer à
me casser les bonbons pour douze euros de découvert.
– Quand
je pense que, moi, il m’a refusé mon prêt sous prétexte que
j’avais pas un boulot suffisamment stable. Je t’en ficherais,
moi ! Oh, mais on va le soigner. Vous inquiétez pas qu’on va
le soigner !
– On
l’opère comment ?
– Le
mieux, c’est de laisser Chloé continuer à s’occuper. Et quand
c’est mûr, qu’il lui file un rancart, on avise…
– Le
connaissant, comme je le connais maintenant, ça risque de mettre un
moment.
– On
s’en fiche. On n’est pas pressées.
– Et
de se passer à trois cents kilomètres d’ici…
– Eh
ben, ça nous fera voir du pays.
– Et
la deuxième. De deux choses t’avais parlé…
– Je
suis aussi tombé sur l’ex de Jessica.
– Sylvain ?
– Sylvain,
oui ! Il cherche…
– C’est
pas vrai ! T’es sûre ?
– Certaine.
– Quelle
petite ordure ! Non, mais quelle petite ordure !
– Tu
t’en fous de lui, maintenant.Tu l’as largué.
– Oui.
Enfin, non. Je vous ai pas dit. On s’est revus. Et il m’a juré
que… Et merde, tiens ! Merde !
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