Bénédicte brandissait une grande
enveloppe marron…
– Qu’est-ce que c’est ça, les
filles ? Hein ? Qu’est-ce que c’est que ça ?
– On en sait rien, nous… Comment tu veux ?
– Un CDI… Eh oui ! Il a tenu parole
notre petit Mickaël…
– Il a pas perdu de temps, dis
donc !
– Faut croire qu’il est pas trop
rassuré…
– Oh, alors ça… Ça fait pas l’ombre d’un
doute… Et donc… Donc c’est le moment d’enfoncer un peu plus le clou…
– Tu sais pourquoi je t’ai fait venir ?
– Ben…
– D’abord pour te signifier que j’ai
bien reçu, comme convenu, un contrat d’embauche paraphé en bonne et due forme
par ta patronne… Et ensuite pour qu’on se mette bien d’accord tous les deux à
ce sujet : aux yeux de tout le monde – de mes collègues comme des clients
– je serai une employée comme les autres… Ni plus ni moins… Mais tu me rendras
quotidiennement des comptes… Et gare à toi si tu omets quoi que ce soit
d’essentiel… C’est bien compris ?
– Oui…
– Tu y auras d’autant moins intérêt que
tu seras placé sous haute surveillance… À la moindre incartade, au moindre
inadmissible écart de conduite avec l’une ou l’autre des femmes de
l’établissement, je déballe tout… Tout ce que je sais… Et tout ce que tu vas encore
nous raconter… Parce que tu n’en as certainement pas fini avec les confidences…
Non ? Je me trompe ?
– C’est-à-dire…
– Que tu es dans une situation
extrêmement inconfortable… Oui… Ça on a bien compris… Tu es dans le brouillard…
On est au courant de quoi au juste ? Tu n’en as pas la moindre idée… Et tu
navigues à vue… Entre le risque de nous dévoiler ce qu’on ignore et celui de
garder le silence sur ce qu’on sait… Et de t’exposer, du coup, à ce que le
couperet tombe… À ce que ce soit nous qui fassions des révélations très
embarrassantes pour toi aux principales intéressées… Et pas seulement à elles…
Alors un conseil : te pose pas tant de questions… Et dis-nous tout…
Absolument tout… Soulage ta conscience… Tu t’en trouveras bien, tu verras…
Allez, on t’écoute…
– J’ai tout dit…
– Ben voyons !
– Si, c’est vrai, hein !
– Tu sais très bien que non… Bon, mais
on va te rafraîchir la mémoire… Il y a plein de choses qui vont te revenir
après, tu verras… Allez ! Chut… Il se laisse faire ce grand garçon… Sinon…
Là… Et on bouge plus…
– Alors ? Ça te revient ?
– Peut-être, oui…
– À la bonne heure… Donc…
– C’était il y a longtemps… Une bonne
dizaine d’années…
– Non, non… Bouge pas ! Reste là…
En travers de mes genoux… T’es très bien là… Et puis on sait jamais… Si t’avais
encore des trous de mémoire… Bon, mais elle s’appelait comment ?
– Marjorie… Une fille d’une
beauté ! De Pornichet elle était… Où je passais mes vacances et où elle
s’ennuyait à mourir… Elle ne rêvait que d’une chose… Paris, Paris et encore
Paris… Elle ne jurait que par ça… Les magasins… Les cinémas… Les lumières…
– Je vois… Et tu lui as promis de
l’emmener là-bas avec toi… Histoire de pouvoir coucher avec… Et quand t’as eu
ce que tu voulais… Plus question de Paris…
– Non, mais si ! Je l’ai emmenée,
hein ! Seulement…
– Seulement ?
– Ça l’a pas fait… Deux mois ça a duré
tous les deux – un peu plus de deux mois – et puis…
– Tu l’as jetée comme une malpropre…
– Quand ça le fait pas…
– Sauf que tu le savais… Dès le début tu
le savais que ça le ferait pas… Que tu n’éprouvais pour elle que du désir… Et
que le jour où ton désir se serait émoussé…
– On n’est jamais sûr de rien…
– Oui, enfin ça ! Non… Tu ne
pensais qu’à ton petit intérêt immédiat à toi… Ton petit plaisir à toi… Quitte
à mettre une pagaille monumentale dans sa vie à elle… Ce qui s’est bien
évidemment produit… Non ?
– Un peu…
– Beaucoup tu veux dire, oui… Parce qu’elle
avait du travail à Pornichet, je suppose… Un travail que tu lui as fait perdre…
– Elle en aura retrouvé…
– T’en sais rien du tout… Et son petit
ami ? Elle avait bien un petit ami quand tu l’as rencontrée, non ?
– Peut-être… Elle m’a pas dit…
– Menteur ! Bon… Ben on va en
remettre une couche… Une bonne couche… Amplement méritée… Non ? Tu crois
pas ?
– Si !
– À la bonne heure… Tu deviens
raisonnable…
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