lundi 14 septembre 2015

Studieuse rentrée: récit de Lisa (1)

Pourquoi elle lui en flanquait plus des fessées Émilie à Damien ?
– Il me faudrait une raison… Et, pour le moment, j’en ai pas…
– Une petite piqûre de rappel de temps en temps… Ça peut pas faire de mal…
– Oui, enfin… Si je me mets à lui en coller à tout bout de champ… Pour un oui ou pour un non… Ça va perdre tout son sens… Et son efficacité… Non… Pour le moment, j’ai vraiment pas à me plaindre… Il s’écarte pas… Il reste dans les rails… Il bosse… Il met plus les pieds au café… Ces fameux copains, qui exerçaient sur lui une influence si négative, il a pris ses distances avec… Non… Je vois vraiment pas quelque motif que ce soit de sévir… L’essentiel, pour le moment, c’est que ce soit toujours là, en filigrane, entre nous… Qu’il sache qu’à la moindre incartade je le louperai pas… Et que ça fasse son petit effet… Que ça le rende accommodant… Il l’est devenu… Il l’est de plus en plus… Il s’en remet à moi… Pour plein de choses… Pour presque tout… Non… Un mec, faut le cadrer… Faut prendre résolument le dessus… Dans son intérêt… Mais surtout dans le tien… Il t’en fait voir de toutes les couleurs sinon… Il te fait vivre l’enfer… Le jour où elles auront compris ça, les nanas…

Elle en a de bonnes, elle ! Elle croit que ça se mate comme ça un mec ? Qu’il suffit de le décider et que ça suit son cours tout seul… T’as qu’à y croire… Ils se laissent pas faire… Et c’est un très mauvais exemple son Damien… Parce que si cette Mademoiselle Lancel le lui avait pas apporté ligoté sur un plateau d’argent, jamais elle aurait réussi à lui claquer le derrière… Ni à en faire apparemment tout ce qu’elle veut… Apparemment… Parce que ça me fait doucement rigoler tout ça… Qu’est-ce qu’elle croit ? Qu’il s’est amendé… Qu’il est devenu petit toutou bien docile ? Tu parles ! Il fait contre mauvaise fortune bon cœur, oui… Il a pas le choix… Mais, en réalité, c’est hypocrisie et compagnie… Il donne le change… Et dès qu’il aura l’occasion de lui mijoter un petit coup par derrière…

Il se fiche d’elle… Non, mais carrément, là… Et de plus en plus ouvertement… Que je te joue les petits garçons bien sages… « Oui, Émilie par ci… Certainement, Émilie par là… Comme tu voudras, Émilie… » Je t’en foutrais, moi… Quant à elle, pas moyen de lui faire entendre raison…
– Il est pas comme ça… Tu exagères…
– Mais ouvre les yeux, bon sang ! Il joue un rôle… Ça se voit comme le nez au milieu de la figure…
– T’as une dent contre lui… C’est pour ça… T’as jamais pu le sentir…

Moi, en tout cas, je ne suis pas dupe… Et ce que ça peut m’agacer de le voir jouer la comédie comme ça sans arrêt… Alors je le ménage pas… J’hésite pas à appuyer là où ça fait mal… Il a ça en horreur…
– Tu te rappelles le soir où t’es rentré complètement bourré ?
Il baisse les yeux… Il s’agite sur son siège…
– Hein ? Tu te souviens ?
Il se souvient, oui… Mais il est très absorbé par son devoir d’allemand… Qui réclame toute son attention… Il fronce les sourcils… Il réfléchit… Il fait semblant…
– Ah, t’en tenais une bonne, on peut pas dire… T’étais tellement saoul que t’étais pas foutu de te déshabiller tout seul… Il a fallu qu’on te le fasse toutes les deux avec Émilie… Même que c’est moi qui te l’ai retiré ton pantalon… Et le calbut avec… Ce qu’a pas été simple… Parce que t’aidais pas… Tu réagissais pas… Un vrai poids mort… Si bien qu’on a été obligées d’attendre le lendemain pour te la flanquer ta correction… Que tu sois suffisamment lucide pour en profiter à plein… Mais alors là, le lendemain… Ah, elle y a mis tout son cœur Émilie, hein ! Elle était furieuse… Faut dire qu’il y avait de quoi… En attendant, ça a dû te brûler un moment… Non ?
– Encore assez, oui…
Je souris d’un air entendu… Un moment ? Tu parles ! Un sacré moment, oui… Deux ou trois jours… Au moins…
Je ne le tiens pas quitte pour autant…
– Et la suivante ! Alors là, la suivante ! Obligé de te déshabiller… De toi-même… De nous présenter gentiment, tout penaud, ton petit derrière… D’en passer, la mort dans l’âme, par où on avait décidé que tu allais en passer… T’avais pas le choix… Impossible de te rebeller… De chercher à te soustraire… Sinon… Ah, comment tu bouillais à l’intérieur ! Et comment tu luttais : fallait surtout pas qu’on se rende compte de quoi que ce soit… Oui, ben, raté, mon cher ! Raté… Ça te transpirait de partout…
Il fait son impassible… Son impénétrable…
J’enfonce le clou…
– On ne peut pas indéfiniment donner le change… Dissimuler ce qu’on est… Tu finiras par être ce que tu es à découvert… Forcément… C’est peut-être la prochaine fessée qui t’en donnera l’occasion… Ou celle d’après…

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