Mais
c’est qu’il se rebellait ! Petit coq dressé sur ses ergots…
Qui voulait… Qui avait décidé… Je ne le corrigerais plus…
C’était fini… Et puis quoi encore ! Il voulait
l’affrontement ? Il allait l’avoir… Il n’y en a pas eu…
Il a suffi que je hausse un peu le ton pour que la baudruche se
dégonfle… Pour qu’il file aussitôt droit… C’était
prévisible : il n’a pas de moëlle ce garçon… Pas de
colonne vertébrale… Il lui faut quelqu’un, constamment, derrière
lui, pour le forcer à se tenir debout… Et droit… Je lui ai
néanmoins fait payer ses velléités de rébellion au prix fort. Que
lui passe, une bonne fois pour toutes, cette détestable manie de
faire des caprices…
Je
lui ai d’abord infligé une correction particulièrement appuyée…
Et au martinet cette fois-ci…Une correction que j’ai fait
interminablement durer… Malgré ses supplications…
– Oh,
s’il vous plaît ! Arrêtez ! S’il vous plaît…
Pitié ! Je le ferai plus… Arrêtez !
Je
ne l’ai interrompue que lorsque je l’ai estimée, moi,
suffisante… Pour exiger alors qu’il s’agenouille, nu, pour
solliciter mon pardon… Que je ne lui accordé, du bout des lèvres,
qu’après le lui avoir longuement fait attendre…
Il a
voulu se relever…
– Non,
non… Tu restes comme ça… Tu es très bien comme ça… Et tu
écoutes ce que j’ai à te dire… Ce que j’ai, de mon côté,
décidé… Alors d’abord tu vas dire à ta petite amie, à Émilie,
que je veux la voir… Dès que possible…
– Hein ?
Mais pour quoi faire ?
– Tu
le sauras bien assez tôt…
– Peut-être
qu’elle voudra pas venir… Elle vous connaît pas…
– Oui,
ben alors ça ! Tu te débrouilles comme tu veux, mais il faut
qu’avant ce soir elle ait franchi cette porte… C’est bien
compris ?
Il a
fait signe que oui… C’était compris, oui…
– Bon,
mais on va quand même faire en sorte que tu n’oublies pas…
– Et
j’ai repris le martinet…
– Oh,
non !
– Bien
sûr que si ! Tourne-toi !
Il
l’avait accompagnée…
– Qu’est-ce
tu fais là, toi ?
– J’ai
pensé…
– T’as
pas à penser… T’as à faire ce qu’on te dit… Un point, c’est
tout… Tu rentres chez toi… Et n’en profite pas pour te
précipiter au café… Parce que je le saurai…
Il a
filé sans demander son reste…
Émilie
a hoché la tête…
– Vous
en faites vraiment tout ce que vous voulez, hein…
– Oui,
oh, avec lui c’est pas bien compliqué… Tu pourrais, toi aussi,
si tu voulais… Tu devrais d’ailleurs… Un homme, si on prend pas
le dessus, on finit toujours, tôt ou tard, par s’en mordre les
doigts…
– Ben
oui, mais…
– T’y
vas en douceur… Progressivement… D’autant que je vais continuer
à te déblayer largement le terrain… Parce que… Il est inquiet
là, non ?
– Ah,
ça ! Il a passé l’après-midi à se demander ce que vous
pouvez bien me vouloir… Et à me le demander… Sûr que ce soir je
vais avoir droit à un interrogatoire en règle…
– Oui,
ben quand il va savoir…
– C’est
quoi ?
– Tu
pourras lui dire que je t’ai demandé de me signaler
systématiquement ses incursions au café…Fréquence et durée…
– Il
va pas apprécier…
– Ça,
je me doute…
– Il
y croira pas que je vais vous le dire… Je le vois d’ici… « Tu
me ferais pas ça, hein, ma chérie ? »
– À
toi de te montrer déterminée… Inébranlable… Tu me le diras…
– Il
y croira pas quand même…
– Mais
une fois que tu l’auras fait…
– Ça
changera rien… Vous savez pas quelle importance ça a, pour lui,
les copains…
– Je
me doute, si ! C’est bien pour ça qu’il faut agir… Dans
son intérêt… Dans l’intérêt de ses études… De son avenir…
Et dans ton intérêt à toi… Le temps qu’il ne passera pas au
café il t’en consacrera la majeure partie…
– Et
vous ferez quoi s’il y va quand même au café ? Vous lui
donnerez la fessée ? Ça y changera quelque chose, vous
croyez ?
– Si
je la lui donne devant toi, sûrement, oui…
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