dimanche 12 avril 2015

Studieuses vacances: récit de Damien (5)

– Coucou… C’est moi…
Émilie…
– Je t’avais dit que je te ferais signe…
– Oui, mais t’avais aussi dit deux jours… Ça fait deux jours… Pile-poil… Et je suis en manque… Alors, allez !
– Non, attends !
– Attendre ? Attendre quoi ? Tu vas pas encore remettre ça avec tes histoires de devoirs de vacances… C’est pas parce qu’on va passer une heure ensemble… T’auras bien le temps de bosser après n’importe comment…
Elle m’a poussé vers le lit… Fait tomber dessus… Couchée sur moi, elle a cherché mes lèvres…

Elle s’est nichée au creux de mon épaule…
– C’était bon… Comment c’était bon… Pas toi ?
– Si ! Oui…
– Faut dire qu’est-ce que j’avais envie aussi ! Et qu’est-ce que j’ai encore envie !
On a recommencé… Et on s’est endormis…

– Hein ? Mais qu’est-ce que c’est que ça ?
Réveillé en sursaut, je me suis précipitamment remis sur le dos… Ai tiré drap et couverture sur moi…
– Non, mais attends ! Fais voir ! Fais voir, j’te dis !
Elle n’a eu de cesse qu’elle ne m’ait fait retourner… Ce que, de guerre lasse…
– Mais oui ! Une fessée tu t’es pris… Et une bonne ! Non, mais c’est pas vrai que tu t’es pris une fessée ! C’est qui ?
– C’est rien… C’est personne…
Et j’ai voulu me lever…
– Non, non, non, non, non… Tant que tu m’auras pas dit… Dis-moi ! C’est qui ?
– Oh, mais elle ! Tu te doutes bien…
– Qui ça, elle ? La bonne femme qui te donne des cours ? C’est trop, ça ! Et pourquoi elle t’en donne ? Pour te faire bosser, ben oui, évidemment ! Et c’est pour ça que… Ah, ben oui ! Oui… Je comprends mieux maintenant pourquoi t’es aussi acharné à te plonger le nez dans tes bouquins… C’est que t’as pas envie de t’en ramasser une… Comme quoi ça marche… Avec toi ça marche… Mais ça, ça m’étonne pas… C’est bien plus tôt qu’elle aurait dû te prendre en mains en fait… Ça t’aurait évité de perdre ton temps… Et de redoubler à tire-larigot… »
– Bon, allez, faut que j’y aille…
– Non… Attends !  T’as bien deux minutes… C’est pas l’heure… Ça te fait mal quand je touche ? Et là ? Non plus ? Et si j’appuie ? Ah, oui, hein ! Ça devait être pire au début, non ? Qu’est-ce tu sentais ? Ça devait drôlement brûler, non ? À quand ça remonte ? Deux jours… Ben oui… Forcément puisque c’est deux jours que t’avais dit qu’on resterait sans se voir… Sauf que c’est raté… Elles sont restées les marques… Bien fait pour toi… Ça t’apprendra à vouloir me cacher des trucs…Pourquoi tu voulais pas que je sache ? T’avais honte, c’est ça ? Et là-bas, quand elle te le fait, t’as honte ? Oui… Évidemment… Tu me dirais le contraire… Comment ça se passe ? C’est elle qui te déculotte ou bien elle veut que tu le fasses toi-même ?
– Je vais être en retard… Cette fois je vais être vraiment en retard…
– Et alors ? Elle t’attendra bien cinq minutes, non ?
– J’y vais… Faut que j’y aille…

– Bien… Alors comme convenu je suis allée trouver tes parents… Et nous sommes tombés d’accord : tu poursuivras tes études dans le même établissement que l’année dernière…
– Merci… Oh, merci…
– À charge pour moi de faire en sorte que tu réussisses ton année… Je m’y suis engagée… Et j’ai bien l’intention d’y parvenir… Donc, outre les dispositions que nous avons déjà prises, toi et moi, concernant cette jeune fille, – et dont je ne leur ai évidemment pas fait part… Cela ne nous concerne que tous les deux – il a été décidé que tu te présenterais chez moi tous les mercredis et tous les samedis, en début d’après-midi, muni de ton carnet de correspondance, de ton cahier de textes et de tous les travaux, dans toutes les matières, que tu auras réalisés dans la semaine… J’aviserai alors sur pièces et déciderai de la conduite à tenir…
– Est-ce bien clair ?
Ça l’était, oui…
– Autre chose… Tu connais certainement Madame Lambredec…
– C’était ma prof d’Histoire l’année dernière…
– C’est également une vieille amie à moi… Je lui ai parlé de toi… Elle va faire en sorte de te compter parmi ses élèves cette année encore… Et elle me rendra compte, au jour le jour, de la façon dont tu te comportes…
– Vous lui avez dit ? Vous allez pas lui dire ?
– Que… ? J’ai été amenée à utiliser, avec toi, des méthodes qui ont fait leurs preuves ? Pas encore, non… Je ne le ferai que si j’y suis contrainte par ton attitude ou tes résultats… À bon entendeur…

– Alors ? Elle t’en a mise une aujourd’hui ?
– Non…
– C’est sûr, ça ? Tu me racontes pas encore une grosse menterie ? Fais voir…

Studieuses vacances: récit de Mademoiselle Lancel (5)

– Mademoiselle Lancel ?
– Elle-même, oui…
J’ai tout de suite su… Compris… Sans l’ombre d’un doute… C’était elle… Cette Émilie…
– Ce serait possible de vous parler deux minutes ?
– Oui, mais pas plus… J’allais sortir…
– Ce sera pas long, j’vous promets…
– Eh bien, entrez ! Asseyez-vous…
Et je l’ai laissée venir… Se dévoiler…
Oui, alors voilà… Elle était la copine de Damien, le garçon à qui je donnais des cours… Enfin ils sortaient ensemble, quoi ! Et elle s’était aperçue d’un truc… C’était pas facile à dire, mais bon… Elle avait vu qu’il s’était pris une fessée…
– Soi-disant que c’est vous qui la lui avez donnée…
– C’est moi, oui…
– Ah, ben j’aime mieux ça ! Non… Parce que ça tournait dans ma tête… Je me demandais… S’il y avait pas une autre fille avec qui il faisait ce genre de choses… Et on peut jamais savoir avec lui… Bon, mais si c’est vous, ça me rassure…
– C’est bien moi, je confirme… Et il y en aura vraisemblablement d’autres… À moins qu’il ne se mette à travailler d’arrache-pied… Ce dont je doute d’ailleurs…
– Ah, ça !
– D’autant que, si j’ai bien compris, il te consacre une grande partie du temps qu’il devrait passer à étudier…
– À moi ? Oui, ben alors là !
– S’il redoute tant la pension, à ce qu’il prétend, c’est qu’elle le séparerait de toi… C’est qu’il ne pourrait plus te voir tout son saoul… Mais autant que tu sois au courant : j’ai l’intention d’y mettre bon ordre… Ses études avant tout…
– Non, mais attendez, je rêve là… Je rêve… Ça va être de ma faute… Alors que je dois pleurer pour le voir… Qu’il faut que je le supplie pour qu’il finisse par m’accorder une après-midi par ci, une soirée par là… Qu’il y en a que pour les copains… Qu’il est tout le temps fourré avec… Des heures il y passe… À décortiquer les matches en chiquant des bières… Seulement ça il s’en vante pas… C’est plus commode de me faire porter le chapeau… C’est pas moi qui lui manquerait en pension, allez ! C’est ses sacro-saints copains… Et il est allé vous raconter que… Quel salaud ! Non, mais quel petit salaud !
– Ah, il le prend comme ça ! Il va voir… Alors là il va voir…
– Vous allez lui remettre une fessée ?
– Et carabinée… Il est pas près de l’oublier celle-là…
– Vous allez pas…
– Lui dire que c’est toi qui as vendu la mèche ? Non, non… T’inquiète pas !


Dès son arrivée je me suis montrée résolument froide avec lui… Distante… Et puis cassante… Ironique… De plus en plus au fur et à mesure qu’on avançait dans la correction de son résumé… Il s’est troublé… Agité sur sa chaise… À l’évidence il s’interrogeait… Qu’est-ce qu’il avait pu faire ? Dire ? Il y avait quelque chose… Il y avait forcément quelque chose… Il était coupable, oui, mais coupable de quoi ? Il a failli me poser la question… À plusieurs reprises… S’est chaque fois ravisé… Au dernier moment… J’ai fait durer… Jusqu’à ce que je l’aie bien en mains… À ma merci… Et puis je me suis levée…
– Bon, allez ! Tu te déshabilles… Tout… T’enlèves tout… Mais tu commences à avoir l’habitude…
Il n’a pas protesté… Il a obtempéré… Sans un mot…
– À genoux ! Là !
Devant le canapé…
La baguette de noisetier je la lui ai promenée tout le long du corps… Lentement… Très lentement… De la nuque jusqu’au bas des reins… Sur les fesses… Il s’est crispé dans l’attente d’un coup qui n’est pas venu…
– Tu sais pourquoi tu vas être puni, je suppose…
– Oui… Enfin non… C’est-à-dire que…
– C’est-à-dire que tu es un garçon sournois… Sournois et dissimulateur…
– Mais non, je vous assure, je…
Une grande cinglée… À toute volée… Il a poussé un cri… Bondi du derrière…
– Tu t’y attendais pas à celle-là, hein ! Oui, mais donc, tu disais ? Excuse-moi ! Je t’ai interrompu… Tu disais ?
– Rien… Non, rien…
– Rien ? Et pourtant tu en as des choses à me dire… Bon, mais je vais t’aider… Te rafraîchir un peu la mémoire… Le hasard a voulu que je fasse la connaissance de l’un de tes camarades de beuverie… Qui m’en a appris, lui, des choses…
Un second coup… Il a étouffé un gémissement… Enfoui sa tête dans les coussins…
– Des tas de choses dont tu as bien pris soin de ne pas te vanter… Et pour cause ! Tu sais pertinemment que si j’avais connu le fin mot de l’histoire, je t’y aurais laissé partir en pension… Oh, mais il est encore temps, hein !
– Oh, non ! S’il vous plaît…
– Oui, ben ça on verra… C’est moi qui décide… En attendant… Tu es prêt ? Parce que là ça va faire mal…