mercredi 4 décembre 2013

Nollwen, Marta et Bastien (13)



Nollwen a voulu qu’on déjeune ensemble toutes les deux…
– Parce que j’ai plein de trucs à te dire, mais vraiment plein de trucs… D’abord, ce matin, avant que t’arrives j’ai eu droit à un grand numéro de Bastien… Dans le registre : « Je vais quand même bien réussir à t’apitoyer… »
– Je vois ça d’ici…
– Figure-toi qu’on lui fait courir de gros risques… De très gros risques…
– Non !
– Eh si ! Parce que plus il y aura de monde au courant dans la boîte et plus ça risque de se répandre comme une traînée de poudre…
– Puissamment raisonné…
– Et donc ce qu’il nous demande, c’est de renoncer à offrir le spectacle de son petit derrière rougeoyant à l’une quelconque de nos collègues…
– Ben voyons ! Et tu as répondu quoi à ça ?
– Que c’était pas à lui de décider… Qu’on offrirait la vision de son anatomie mortifiée à qui bon nous semblerait… Que plus il voudrait la soustraire aux regards et plus on l’y exposerait…
– Excellent !
– Et j’ai ajouté, pour faire bonne mesure, qu’après ce que sa femme nous avait révélé sur son compte, il aurait plutôt intérêt à faire profil bas…
– Et il a voulu savoir ce qu’elle nous avait dit… Ce qu’on savait…
– Même pas, non… Il a piqué du nez dans ses dossiers et je l’ai plus entendu de la matinée…
– C’est ce qu’il avait de mieux à faire… Et à part ça ?
– À part ça j’ai passé la soirée d’hier avec Julia Ravazzi… Plusieurs fois on s’était dit qu’il faudrait bien qu’on aille en boîte ensemble… Et là ça m’a toquée d’un coup… Je l’ai appelée… Seulement ça tombait plutôt mal : il venait de la larguer son mec… En beauté… On a passé deux heures au téléphone du coup… Et je peux te dire que les types elle était plutôt remontée contre… Parce que la troisième fois ça fait qu’on la roule dans la farine… Comme moi… Pareil… Ils te promettent tous des tas de trucs qu’ils ont jamais eu l’intention de tenir… Et quand tu découvres le pot-aux-roses tu tombes des nues… Et ça fait mal, mais mal !
– J’en sais quelque chose…
– Ton amour-propre il en prend un sacré coup en plus… Qu’est-ce que t’as pu être conne… Non, mais qu’est-ce que t’as pu être conne ! Dix mille fois la vérité tu l’as eue devant les yeux… Seulement t’as pas voulu la voir… T’as tout fait pour pas la voir… De fil en aiguille je lui ai parlé de ce petit salaud de Thibaud… Qui trompe sa femme à tout-va… Avec moi… Avec Mélanie… Avec Ismène… Qui trompe tout le monde avec tout le monde… Sans le moindre état d’âme… Je lui ai dit quelle gentille petite surprise on lui réservait… Et proposé, comme à toi, de se joindre à nous… Elle en est… Tu penses bien qu’elle en est… Et qu’elle s’est pas fait prier… Il sait pas ce qui l’attend l’autre… Cinq nanas remontées comme des pendules d’un coup… Je voudrais pas être sa place…
– C’est pour quand d’ailleurs ? Pour bientôt ?
– C’est imminent… Demain… Après-demain au plus tard… Je te ferai signe…
– Ah, oui, hein ! Surtout t’oublies pas…
– Et puis, dans la foulée, parties comme on était, je lui ai touché un mot de Bastien… C’était l’occasion ou jamais…
– Et alors ?
– Ça l’a beaucoup amusée… Je sais pas comment il se débrouille mon cher maître de stage, mais j’ai l’impression que personne peut le voir au boulot… Que tout le monde est ravi quand il se trouve en position délicate…
– Et pour cause… Il est parfaitement imbuvable… T’es payée pour le savoir… En fait il est comme tous ces gens qui, parce qu’ils ont quelque chose à se prouver, écrasent en permanence les autres de leur soi-disant supériorité…
– En tout cas je peux te dire qu’on dispose là, si on veut, d’une collaboratrice particulièrement déterminée…
– Un peu qu’on veut ! Dès demain matin elle sera mise à contribution…

– Qu’est-ce que j’apprends, mon petit Bastien ? On a récriminé…
– Mais non, mais…
– Comment ça »non » ? En somme, si je te comprends bien, Nollwen est une menteuse…
– J’ai pas dit ça…
– Non, mais ça revient au même… On s’en souviendra… Le moment venu… En attendant, à ce qu’il paraît, on a ses petites pudeurs…
– C’est pas ça, c’est que…
– Je me fiche de ce que c’est… Ça m’intéresse pas… Ce qu’il y a de sûr par contre, c’est que t’as pas compris grand chose au film… Parce que nous on n’avait pas du tout l’intention de mettre qui que ce soit au courant… Ce qu’on en disait, c’était pour te faire peur… Te ramener à de meilleures sentiments… Seulement évidemment maintenant que tu as cru bon d’avoir des exigences…
– C’était pas des exigences…
– Tais-toi ! N’aggrave pas ton cas…maintenant la situation est complètement différente… Et tu comprendras qu’on n’ait pas d’autre solution que de sévir…Donc voilà ce qu’on va faire… On va encore une fois te bander les yeux et quelqu’un – cette fois ce sera pas ta femme – ce sera quelqu’un du boulot va te flanquer une bonne correction… Tu auras deux jours pour deviner qui a officié Mais attention ! Une seule réponse… Si tu trouves on s’en tiendra là… Sinon… Sinon on recommencera… Avec quelqu’un d’autre… T’as compris ? Eh bien allez alors… En piste…